C’était à la gare de Tunis, près de la place Barcelone pour être exact. Ce jour-là n’avait rien d’exceptionnel et à bien des égards, ressemblaient à ceux qui l’ont précédé. Je venais alors en train de Boumhal où j’avais pris l’habitude de batailler pour trouver un taxi collectif, faire face au manque de civisme des uns, repousser les regards menaçants des autres, éviter de salir mes habits de boue en marchant sur ce qui parait être des trottoirs… Travaillant à Tunis, je traverse la place Barcelone. C’est alors que l’incroyable se produit. Je tombe nez à nez avec Golshifteh Farahani. Est-ce un rêve ? Non c’est bien elle.
Elle était belle et radieuse et en plein tournage du film « Un divan à Tunis ». J’étais le plus heureux des cinéphiles. Il fallait absolument que j’échange avec elle quelques mots et pourquoi pas immortaliser l’instant par une photo. Née en 1983 à Téhéran, Golshifteh Farahani est la fille de l’acteur et metteur en scène de théâtre Behzad Farahani et de la comédienne Fahimeh Rahimnia. Son père était un opposant de gauche au Shah puis à l’ayatollah Khomeyni. Elle est l’une des actrices engagées les plus douées de sa génération et a travaillé pour les meilleurs cinéastes et avec les meilleurs acteurs et actrices.
Ce que je ne lui ai pas dit ce jour là, c’est qu’une semaine auparavant j’avais regardé l’un des films les plus époustouflants et les éprouvants qu’il m’est jamais donné de voir. Hasard ou coïncidence, elle en tenait l’un des rôles principaux : « La nuit a dévoré le monde » de Dominique Rocher. Un film post-apocalyptique qui n’est pas sans rappeler « 28 jours plus tard » de Danny Boyle. En se réveillant un matin dans un appartement où la veille encore la fête battait son plein, Sam doit se rendre à l’évidence : il est tout seul et des morts vivants ont envahi les rues de Paris. Terrorisé, il va devoir se protéger et s’organiser pour continuer à vivre. Mais Sam est-il vraiment le seul survivant ? En adaptant « La Nuit a dévoré le monde » de Martin Page, Dominique Rocher signe un film de genre comme on en voit très peu en France. « Grave » de Julia Ducournau (Palme d’or à Cannes 2021 pour « Titane ») étant le dernier en date. Le film est une réussite visuelle, sonore et émotionnelle que je conseille à quiconque n’a pas l’âme sensible. Merci Golshifteh. Merci.