Le choix affirmé de résoudre la crise ukrainienne par la voie diplomatique est déjà un résultat positif, mais les cinquante minutes de conversation, jeudi soir, entre Vladimir Poutine et Joe Biden, n’ont pas fait bouger les lignes, les deux hommes ont maintenu leurs positions sans rien obtenir de l’autre. Le Russe a voulu faire croire que l’Américain lui avait promis de ne pas déployer d’armes offensives en Ukraine, mais la Maison Blanche s’est empressée de préciser qu’il ne s’agissait pas d’un nouvel engagement mais seulement d’une confirmation de la situation existante. Le Kremlin se félicite d’une conversation « franche et pragmatique et, bien sûr, utile aux deux parties », un langage diplomatique qui signifie que rien de concret n’a été décidé mais que les deux parties ont échangé leurs positions et arguments et que le dialogue se poursuivra. Ce sera le 10 janvier à Genève, puis le 12 à Bruxelles lors d’une réunion entre la Russie et l’OTAN.
Joe Biden s’est montré ferme en affirmant une nouvelle fois que les Etats-Unis et leurs alliés, qui excluent une réponse militaire, réagiraient de manière décisive si la Russie envahissait davantage l’Ukraine » et que « des progrès substantiels dans ces dialogues ne peuvent se produire que dans un environnement de désescalade plutôt que d’escalade ». Sur le même ton menaçant, Vladimir Poutine a laissé planer une« rupture complète des relations russo-américaines » si Joe Biden commettait la « grave erreur » de prendre des « sanctions à grande échelle contre la Russie en cas d’escalade autour de l’Ukraine ». Match nul.S’il fallait départager les deux présidents, l’avantage reviendrait au Russe. C’est lui qui a pris l’initiative de l’entretien téléphonique, c’est lui qui impose les thèmes de discussion : il veut « de solides garanties juridiques excluant l’élargissement de l’OTAN vers l’est et le déploiement de systèmes d’armes offensifs à proximité immédiate des frontières russes ». Poutine ne souhaite pas non plus que les discussions soient étendues aux alliés des Américains, aux Européens. Son entourage l’a dit : « Nous proposons des négociations sur une base bilatérale avec les Etats-Unis. Si nous impliquons d’autres pays, nous allons tout simplement noyer tout cela dans le débat et le verbiage. » Poutine exige une discussion d’égal à égal. Assurément, son but n’est pas d’envahir, de conquérir l’Ukraine, de déclencher une guerre qui affaiblirait finalement la Russie, mais de maintenir, voire élargir la zone d’influence russe. Une bataille géopolitique, pas militaire.