Tous les jours ou presque, des déclarations occidentales alarment sur l’invasion « imminente » de l’Ukraine par la Russie qui répond qu’elle n’en n’a pas l’intention. Sur le front du Donbass, on entend des tirs sporadiques, des tirs de mortiers, mais ce n’est pas nouveau et dure depuis la guerre civile de 2014. Les soldats russes massés en grand nombre le long de la frontière ? On en parlait déjà il y a un an. Même s’ils sont un peu plus nombreux, ils sont déployés en permanence par Moscou et manœuvrent plusieurs fois par an. Aujourd’hui, pour diverses raisons liées en partie à la situation chez eux de Poutine et de Biden, la tension est à son comble et la guerre donnée comme « imminente » .
Mais, si l’on écoute bien les propos occidentaux agrémentés de menaces de sanctions « massives », ils se terminent toujours dans la nuance : le conflit n’est pas « forcément inévitable », nous envoyons 3 000 hommes dans plusieurs pays d’Europe de l’Est, mais pas pour se battre, déclare Washington. Tous les éléments sont réunis pour qu’il y ait intervention mais il n’y aucune information sur la volonté de Poutine de lancer une offensive », dit-on à Paris. A Kiev, le général de brigade Dmytro Krasynikov ne voit ni mouvement ni renfort indiquant une intention d’attaque.
Certes, tout est possible, à commencer par des cyberattaques qui pourraient faire très mal à l’Ukraine. Mais peut-on vraiment évoquer une troisième guerre mondiale, un holocauste nucléaire ?
S’il n’y avait pas de réels motifs d’inquiétude car de provocations en manipulations, on peut arriver au pire, on serait au bord du rire dans cette guerre psychologique. Comme en entendant le Pentagone affirmer qu’il a des preuves que la Russie est prête à diffuser de fausses vidéos montrant une invasion ukrainienne avec des acteurs faisant les morts et du matériel identifié Ukraine ou Otan… Comme en voyant l’Allemagne qui refuse de livrer des armes, promettre 5 000 casques et un hôpital de campagne…
L’Europe qui, contrairement à Biden n’a rien à prouver sinon, et c’est important, qu’elle peut exister, se montre moins belliqueuse. Fidèle à l’allié américain, elle s’efforce avant tout de pousser à la désescalade. Avec une double casquette, française et européenne, Emmanuel Macron sera lundi à Moscou. Il s’est déjà entretenu, sans succès apparent, trois fois avec Vladimir Poutine. Des sources informées pensent que s’il va au Kremlin, c’est parce qu’il sait qu’il n’essuiera pas publiquement une rebuffade. Le 15, c’est Olaf Scholz qui fera le voyage.
Lancé dans sa croisade pour la restauration de la grandeur russe, le maître du Kremlin ne peut céder sans rien obtenir. Et même s’il fait un geste, il sait que seul Biden peut s’engager. Il faudra bien, et le plus tôt sera le mieux, que Russes et Américains rediscutent de défense et de sécurité, remettent sur la table le traité de Moscou de septembre 1990 et les promesses -non écrites- que Washington n’auraient pas tenues. Des négociations à mener avec l’Ukraine qui, précisons-le, n’est pas un pays vraiment démocratique et n’a pas appliqué les accords de Minsk de 2015 sur le statut spécial à accorder aux régions du Donbass de Donetsk et Lugansk. Ce n’est pas non plus Erdogan qui pourra trouver une solution. Il aime se mêler de tout, mais depuis deux ans Poutine refuse sa médiation et il est coincé entre des intérêts contradictoires. Derrière les mots excessifs, n’y a-t-il pas la recherche d’une porte de sortie ?