Lors de son discours de politique générale, Giorgia Meloni a promis de bloquer les arrivées de migrants en provenance d’Afrique. La Libye est la principale visée, mais la nouvelle cheffe du gouvernement de Rome pense également à la Tunisie, même si les situations sont différentes. Son nouveau ministre de l’Intérieur, Matteo Piantedosi, a déclaré qu’il pourrait empêcher les navires des ONG, et les migrants secourus à leur bord, de se rendre en Italie. Là, il fait directement allusion à la Libye.
Rien n’est fait, mais cela pourrait renvoyer aux pires heures de Matteo Salvini, le patron de la Lega, naguère jugé pour avoir bloqué des migrants en mer en 2019.
Durant la campagne électorale, il a beaucoup été question d’établir un blocus naval pour empêcher tout départ des côtes libyennes et Mme Meloni, sachant que rien ne serait possible sans l’aval de l’Union européenne envisageait de payer Tripoli pour empêcher les migrants de se rendre en Italie où, d’ailleurs, leur vie est de plus en plus difficile.
Aujourd’hui au pouvoir, celle qui oublie son admiration de Mussolini et dément avoir eu des sympathies pour des régimes antidémocratiques n’ira sans doute pas aussi loin car l’Italie a trop besoin des fonds européens, mais elle reste dans le même esprit : « mon objectif est d’arrêter les bateaux de migrants traversant la Méditerranée. Nous devons mettre fin aux départs illégaux et au trafic d’êtres humains ».
Tous les jours, des bateaux partent de Sfax surchargés de Tunisiens et d’Africains qui espèrent une meilleure vie, un leurre qui leur coûte cher et trop souvent la vie. En décembre dernier, le ministre italien des Affaires étrangères de l’époque, Luigi di Maio, avait discuté avec le président Saied de l’immigration clandestine. Le président tunisien s’était contenté de mots soulignant, « les limites des politiques traditionnelles dans la gestion du phénomène de l’immigration » clandestine, appelant à une vision commune susceptible d’encourager « l’immigration régulière selon des mécanismes respectant le droit des migrants ». Pour sa part, Romdhane Ben Amor, président du Forum tunisien pour le droits économiques et sociaux, déclarait que « la Tunisie s’est transformée en gardien de la mer ». Si cela a pu être vrai, ce n’est plus le cas et les tentatives de gagner Lampedusa se multiplient. Et les raisons ne sont que trop connues.
Le 17 octobre, en recevant sa Première ministre Najla Bouden Kais Saied, comme à son habitude, évitait de regarder les choses en face en affirmant que l’immigration irrégulière n’est devenue un phénomène qu’à cause des gros « poissons » qui n’ont pour mission que d’abuser du peuple, en détruisant tout espoir de vie digne dans son pays. Il assurait que tout manquement doit être assumé par ceux qui n’ont pas fait leur devoir convenablement.
Selon les dernières statistiques officielles, plus de 22.500 migrants ont été interceptés au large des côtes tunisiennes depuis le début de l’année, dont environ 11.000 sont originaires d’Afrique subsaharienne.
Durant la même période, 536 organisateurs et passeurs parmi lesquels 21 étrangers ont été arrêtés.
« Si cette tendance se poursuit, on va arriver à un point où on ne pourra plus contrer ce phénomène », confie à l’hebdomadaire L’Express, le colonel major Saber Younsi, directeur de la gendarmerie maritime de la région centre, donc de Sfax, la plaque tournante de cette migration clandestine.
«Nos villes sont délabrées et invivables», expliquait Fratelli d’Italia dans son programme. A cause des immigrés – 519 000 sans-papiers. Souvent des musulmans. En octobre 2019, Giorgia Meloni affirmait devant ses militants qu’elle se battrait «contre l’islamisation de l’Europe, parce que nous n’avons aucune intention de devenir un continent musulman» Aujourd’hui, elle ne parle que de lutte contre « le fondamentalisme islamique ». Elle oublie, comme pour Mussolini ?