Auteur francophone de talent, Mouha Harmel vient de remporter le Comar d’or pour le roman en langue française « Siqal l’antre de l’orgresse ». Il répond avec zèle et passion aux questions de Tunisie Direct
-Mouha Harmel « Siqal l’antre de l’orgresse » est votre cinquième livre. Il s’agit également de votre troisième roman après les excellents « Les rêves perdus de Leila » et « Le sculpteur de masques ». Quel est le sujet de votre nouveau livre? Livre qui, rappelons- le, vient de remporter le Comar d’or pour le roman en langue française.
Après « Sculpteur de masques » et « la Machine Broyeuse de Rêves », mon dernier roman, « Siqal », renoue avec l’univers fantastique des contes tunisiens d’ogres et d’ogresses. J’y raconte le destin de quatre sœurs, Emna, Yasmine, Aziza et Leila, vivant à Chébika, village proche de Tozeur, dans un passé lointain, situé assez librement vers la fin de l’ère Hafside. Le père Si Ali part en pèlerinage après avoir jeté un sort au chien Ghyath afin qu’il assure la protection de ses filles. Les quatre sœurs sont attaquées par une ogresse qui enlève la plus jeune des sœurs, Leila. Emna, en compagnie du chien et de l’apprenti du derviche de la Zaouïa, Mohamed, part à la recherche de l’antre du monstre pour trouver Leila.
-« Siqal l’antre de l’orgresse » marque t-il une rupture ou s’inscrit-il plutôt dans la continuité de vos précédents romans?
Je dirai les deux : à la fois rupture et continuité. J’y explore une nouvelle thématique, celle des contes populaires tunisiens avec leur puissance subversive et créatrice. Les personnages féminins y sont nombreux. C’est la première expérience d’écriture où je développe autant de personnages féminins, mais ce défi d’écriture s’est imposé naturellement, puisque les contes d’ogres tournent principalement autour de figures féminines, et qu’en général, ce sont des conteuses qui en assurent la transmission orale. Il s’agit également de la première expérience avec une dimension ésotérique puisqu’il sera question de résoudre des énigmes en lien avec les textes sacrés et les ouvrages de sorcellerie. Mais ceux qui ont lu aussi les deux premiers romans retrouveront certains éléments faisant partie de mes premiers univers : le personnage de Leila, la place accordée aux rêves dans l’initiation et bien d’autres détails que je laisse aux lecteurs le soin de deviner.
-L’on imagine sans difficulté votre prochain ouvrage se déroulant dans un Japon médiéval peuplé de fantômes ou en Amazonie au milieu d’une tribu indienne tant certains thèmes deviennent récurrents comme le mystère, l’inconnu, le voyage intérieur et, ou extérieur, la nature, le fantastique, les contes et légendes…
Il s’agit bien d’univers qui me fascinent, sur lesquels j’ai écrit et sur lesquels je pourrai écrire encore. Leurs fantômes continueront certainement de hanter mes prochains projets d’écriture. C’est très juste ce que tu dis sur le thème récurrent du voyage à la fois intérieur et extérieur dans mes romans, et j’aime que l’on n’arrive plus à faire la différence entre ces deux mondes. J’ai déjà en tête l’idée du prochain roman, d’ailleurs. Il se passera encore en Tunisie. Je n’en dirai pas plus pour le moment ! Juste que la magie du fantastique n’est jamais bien loin.
Propos recueillis par Waley eddine Messaoudi