Bachar al-Assad devait être la vedette du sommet de la Ligue Arabe à Djeddah, mais un de ses ennemis, Volodymyr Zelensky, l’a relégué au second plan. Et, lui, l’obligé de la Russie qui l’a littéralement sauvé, a dû encaisser l’accusation ukrainienne : comme d’autres, il ferme les yeux sur l’invasion russe au lieu d’avoir un « regard honnête ». Il a aussi entendu le remerciement à Mohammed Ben Salmane qui soutient l’unité territoriale de l’Ukraine.
Dure journée pour le président syrien qui ne fait d’ailleurs pas l’unanimité au sein de la Ligue. La « nouvelle phase » de solidarité et d’action arabe commune qu’il réclame n’est pas acquise. Les membres de la Ligue restent divisés. La preuve en est notamment donnée par l’absence de l’Algérien Tebboune qui n’a pas goûté l’attitude saoudienne. Alors qu’Alger estime que c’est son action, sa diplomatie qui a permis le retour de la Syrie, Ryad l’a snobé en ne l’invitant pas aux réunions préparatoires du sommet. Une lutte de pouvoir, d’influence entre les deux pays. L’Arabie Saoudite entend renforcer son poids et jouer dans la cour des grands, totalement émancipée de la tutelle américaine ; l’Algérie se voyait très influente et écoutée, notamment aux dépens du Maroc pas vraiment ami de la Syrie. La presse marocaine s’amuse des déboires de son voisin, le qualifiant de « dindon d’ la farce ».
Au-delà du factuel, il faut avoir conscience que, pour l’instant, la réintégration de la Syrie reste symbolique. Elle se fera pas à pas si Damas satisfait les demandes exprimées dans la déclaration d’Amman qui, en accord avec la résolution 2254 du Conseil de sécurité des Nations unies : libération des prisonniers, nouvelle constitution, élections libres. Et aussi le retour des réfugiés et la fin du captagon.
Il est de notoriété publique qu’Assad n’a jamais tenu ses promesses. Ses « frères » arabes, pas plus démocrates que lui, peuvent le réhabiliter. Mais pour beaucoup, il reste le « boucher », le massacreur de son peuple…