Pas de surprise à Vilnius : l’Otan a fait, globalement, preuve d’unité et réaffirmé son soutien à long terme à l’Ukraine qui ne pourra en devenir membre qu’après la guerre dont on ne voit pas la fin. Mais, au-delà des engagements pris dans le cadre du G7 rejoint par d’autres pays comme l’Espagne, la Norvège ou le Danemark, on a relevé quelques mouvements d’humeur d’ailleurs vite balayés.
« Calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose » disait Francis Bacon il y a quelques siècles. Sur le même mode et depuis le début de la guerre, Volodymyr Zelensky suit une règle, une maxime : « Réclamez, réclamez, vous obtiendrez toujours quelque chose ». Ce quelque chose, ce sont des armes. Il sait que sa contre-offensive n’avance pas aussi vite qu’espéré et surtout qu’il n’aura pas droit à une seconde chance si elle échoue. Pour sa réussite, il lui faut davantage de moyens, des avions. Rapidement. Et, avant de remercier ses alliés, de se féliciter de « résultats globalement bons », il a eu un coup de colère qui traduit un certain agacement. Les promesses et engagements l’ont apaisé, mais le ministre britannique de la Défense, Ben Wallace, non suivi par son premier ministre Rishi Sunak, a vivement répliqué : la Grande Bretagne n’est pas un « Amazon » de la livraison d’armes et Zelensky pourrait avoir « davantage de gratitude ». Il en a beaucoup, l’a assuré l’Ukrainien soucieux d’aller vite vers une victoire sur la Russie.
La Russie, elle, craignait une décision rapide et positive sur l’entrée de Kiev dans l’Alliance. Malgré ses protestations, le Kremlin, qui avait dit observer avec attention la réunion de Vilnius, est plutôt satisfait du résultat : l’adhésion n’est pas pour demain, la guerre sera longue et la Maison Blanche pourrait changer de locataire en novembre 2024.
Cependant, les 31 de l’Otan ont avalisé implicitement un constat : Vladimir Poutine est affaibli. S’il n’existe aucun signe visible d’une prochaine destitution, l’alliance a remarqué qu’il est en échec, qu’il n’avait pu trancher entre Choïgou et Prigojine, qu’il était contraint de revoir l’aide apportée par Wagner en Afrique et que, surtout, l’attitude du Turc Erdogan avait changé. Rompant un accord avec Moscou, il a libéré cinq « prisonniers » d’Azovstal, ce qui montre qu’il estime que son partenaire russe a perdu du crédit. S’il se rapproche de l’Occident, c’est aussi parce que son pays, en grave crise économique, a besoin de devises que la Russie ne peut lui apporter. Ce qui n’empêchera pas Erdogan de continuer à jouer sur tous les tableaux, mais l’entrée de la Turquie dans l’UE restera illusoire.
Quant à la Russie, est-ce cette faiblesse visible qui l’a poussée à bloquer l’accord céréalier et à fermer le point de passage de l’aide humanitaire dans le nord-ouest de la Syrie. Le Kremlin chercherait des compensations…