Le président Kais Saied a donné, pour première mission, au nouveau chef du gouvernement, Ahmed Hanachi, de « poursuivre l’assainissement de l’administration tunisienne ». Une mission chère au Président de la République, puisqu’il la mentionne à chaque discours. Une obsession presque.
Néanmoins,deux problèmes se posent, au moins.
La première étant de définir en quoi consiste cette « purification » de notre administration. Instinctivement, on pourrait penser qu’il s’agirait d’écarter toutes les personnes issues des précédents gouvernements. Mais depuis deux ans que le Président en parle, ça aurait dû être fait, non? Entre le 25 juillet qui a impliqué un changement de gouvernement, les réformes constitutionnelles, les emprisonnements… Il ne doit plus rester grand monde.
D’ailleurs on évitera de souligner que cette « purification » tant désirée par Kais Saied a des allures de purge et de discrimination puisqu’elle n’obeit finalement à aucune autre règle que la malchance d’appartenir à un régime précédent.
Deuxième problème: le décalage entre les préoccupations du peuple et celle du Président. L’administration n’est pas le problème du peuple. Ce qui occupe les pensées de nos concitoyens, et comme partout d’ailleurs, c’est le pouvoir d’achat. L’inflation exponentielle des denrées alimentaires auxquelles s’ajoutent les pénuries de pain, de sucre, d’huile, de café et même… de coca-cola! Voilà ce qui plombe le moral du citoyen lambda. Sans compter les coupures d’eau et d’électricité.
Face à ces problèmes concrets du quotidien, la seule réponse du Président est un retour dans le temps: « désormais les boulangers feront une seule variété de pain, la baguette blanche au prix unique de 190 millimes ».
Une solution spécieuse qui a due renverser le ministre de la santé de sa chaise, quand on sait qu’en moyenne 25% de la population souffre du diabète et autant d’hypertendus, et nécessite donc un pain aux farines complètes. Une « solution » qui met également un frein à l’économie locale, aux lois de la concurrence etc…
Quand bien même cette solution serait passagère, quelles sont les annonces qui nous garantissent que ce n’est qu’une question de temps? La Tunisie n’inspire plus confiance pour demander des prêts et l’accord avec le FMI est encore loin d’être conclu. Nous sommes dans une impasse, dont la solution n’est pas la purification de l’administration.
Alors qu’en 2011, se faisait partout entendre en Tunisie, » du pain et de l’eau mais plus de Ben Ali »… aujourd’hui, nous ne pourrons peut-être plus, prétendre à ce minimum vital.