Les appels à libérer Alexei Navalny ne cessent pas, les Etats-Unis et l’Europe s’apprêtent à prendre des sanctions, mais la Russie affirme qu’elle ne cédera jamais et s’est lancée à l’offensive contre l’opposant qui purge sa peine à 200 km de Moscou. Tous les médias d’État le dénigrent et rappelle en l’amplifiant son passé nationaliste de « petit nazi » qui, il est vrai, n’est guère à son honneur. Et ils ont enregistré une première victoire: tout en réclamant sa libération immédiate, Amnesty International lui a retiré son statut de « prisonnier d’opinion ». L’organisation se justifie en parlant de ses « discours haineux », du fait qu »il « défendrait ainsi la violence et la discrimination et ne serait jamais revenu sur ses propos ». Ces derniers remontent aux années 2006-2008 et visaient les immigrés originaires du Caucase et d’Asie centrale, principalement des musulmans. Ils les traitaient de cafards, d’insectes qu’il fallait éliminer et conseillait d’utiliser les armes à feu si nécessaire. Ou alors, toujours avec humour, il militait pour leur expulsion. En 2013, candidat à la mairie de Moscou (27% des voix), un de ses thèmes de campagne est la lutte contre l’immigration illégale. Il participe à des marches ultranationalistes, soutient Moscou contre les dissidents en Ossétie du Sud et en Abkhazie et ne condamnera jamais l’annexion de la Crimée.
En 2007, Navalny avait été exclu du parti libéral Iabloko pour « propagande nationaliste » et avait fondé son parti Narod, le peuple en russe mais aussi l’acronyme de « mouvement de libération national russe ». Il aurait regretté d’avoir parlé de violence contre les immigrés mais ne s’est jamais excusé et, en octobre dernier, il confiait au Spiegel qu’il ne voyait « aucune contradiction entre le soutien à un mouvement syndical de gauche et la demande de l’introduction d’un régime de visa pour les migrants d’Asie centrale ».
En Russie, où les partisans du Kremlin l’appellent « l’ethno nationaliste d’extrême droite », certains, y compris parmi ses amis pensent que sur le fond il n’a pas changé mais qu’il a compris que l’angle d’attaque le meilleur contre Poutine est celui de la corruption.
Quoi qu’il en soit, la décision d’Amnesty International est vivement critiquée, considérée par beaucoup comme une absolution donnée à Moscou. Elle a choqué toute l’opposition russe et l’organisation reçoit des centaines de messages pour qu’elle rectifie le tir. Sur Twitter, un ami de Navalny, Leonid Volkov, a écrit: « Amnesty s’est fait nourrir de merde et elle a aimé ça.