Périodiquement, on suggère que la guerre est à un tournant, qu’une offensive peut changer la face de la guerre. Et finalement, rien ne change, quelques km² gagnés et c’est tout. Cette fois, l’avance des troupes dans la région de Kharkiv semble plus sérieuse même si des doutes subsistent sur importance et sa durée. « Nos troupes améliorent constamment, chaque jour, leurs positions dans toutes les directions, a affirmé ce mercredi au Kremlin le président Poutine qui n’avait pu annoncer aucun succès le 9 mai.
La progression russe est réelle, mais les experts militaires l’expliquent surtout par les difficultés rencontrées par les Ukrainiens. Moscou profite d’une fenêtre d’opportunité due à l’insuffisance de munitions de l’armée ukrainienne et au manque d’hommes qui commence à se faire douloureusement ressentir. Poutine a également enregistré le fait que les Occidentaux haussent le ton et commencent à parler d’envoyer des troupes au sol. Les avions F-16 vont bientôt arriver ainsi que les nouvelles livraisons américaines qui, promet Antony Blinken, changeront la donne sur le terrain. Kyrylo Boudanov, le patron du renseignement ukrainien, indique même que la situation est en train de se stabiliser dans la région de Kharkiv.
L’offensive russe, qui ne vise pas à prendre Kharkiv -il faudrait beaucoup plus de forces- mais plutôt à déséquilibrer les défenses ukrainiennes, à affaiblir d’autres fronts, pourrait donc ne pas durer dans le temps. Il ne faut pas oublier ce que Poutine a dit le 9 mai : « La Russie traverse une période difficile ». La croissance est toujours là, mais en raison du passage en économie de guerre. Ce qui signifie que le Kremlin s’oriente vers une guerre longue. Et c’est pour cela qu’il a changé de ministre de la Défense. Le nouveau, Andreï Belooussov n’a pas caché que « le premier [objectif], c’est d’assurer l’intégration de l’économie des forces armées à l’ensemble de l’économie du pays. Ce n’est pas simple et suppose une optimisation des dépenses […]. Ce qui ne veut pas dire leur baisse ». Une réorganisation totale pour poursuivre la guerre et « parvenir à la victoire », a-t-il ajouté. Une victoire inenvisageable tant que les alliés de Kiev fourniront armes et équipements.
Dans l’esprit de Poutine, l’ennemi, ce n’est pas seulement l’Ukraine nazie, mais aussi l’Occident décadent, l’Otan. Un autre tournant pourrait survenir le 5 novembre avec la présidentielle américaine…