La France est-elle à la veille de connaître un séisme politique ? Si le tribunal suit les réquisitions du parquet, Marine Le Pen pourrait se voir privée du droit de se présenter à une élection et donc d’être présidente de la République, une fonction qu’une partie des Français lui voit déjà occupée. Les procureurs, en effet, ont requis contre elle, outre une peine de prison (aménageable) et une forte amende, cinq ans d’inéligibilité assortie d’une exécution provisoire ce qui signifie que même en cas d’appel la décision serait maintenue. Le jugement devrait être rendu au début de l’année prochaine et le procès en appel prendra plus d’un an, possiblement suivi d’un recours en cassation. On ne serait pas loin de la présidentielle de 2027, ou même après….
Comme l’a démontré un procureur dans son réquisitoire, la patronne des députés du Rassemblement national était au centre d’un « système organisé » d’abord par son père, dans le but de faire du Parlement européen la « vache à lait » du Front puis du Rassemblement national au « mépris des règles démocratiques ». Cela a duré près de douze ans, jusqu’en 2016. Le parti des Le Pen était alors à court d’argent…
Les preuves étaient évidentes, présentes dans des documents ou déclarations et les accusés n’ont pas chercher à nier mais ont tenté d’inverser les charges : les règles du Parlement européens n’étaient pas bonnes et un assistant parlementaire doit travailler pour son député, pour son parti et donc pas seulement dans le cadre d’activités ayant un lien avec l’Europe.
Pour le procureur, « le droit doit s’appliquer à tous », la justice ne peut pas être comptable des « ambitions politiques » de chacun. Une thèse partagée par le Garde des Sceaux, Didier Migaud qui a déclaré que «la justice, une fois de plus, applique le droit».
Faux, s’indignent les dirigeants du RN, à commencer par Marine Le Pen elle-même. Ils dénoncent un acharnement, un scandale, une atteinte à la démocratie, un réquisitoire inacceptable. « Dans quel pays vivrions-nous dans lequel on empêcherait la principale femme politique, la plus populaire dans les sondages, Marine Le Pen, de pouvoir se présenter ? » s’insurge le député Sébastien Chenu. Dans « une République bananière » répond l’ex-eurodéputé Bruno Gollnisch.
Jordan Bardella, qui pourrait être le candidat de remplacement a lancé le hashtag #jesoutiensmarine et une pétition au niveau national. Philippe Olivier, conseiller et beau-frère de Marine Le Pen, affirme : « On ne se laissera pas faire. On en appellera à l’opinion publique. Et on fera dix points de plus aux prochaines législatives. Le RN réfléchit à une nouvelle stratégie : alors qu’il ne souhaitait pas voter une motion de censure pour ne pas aggraver le chaos politique et pour montrer son sens des responsabilités, il pourrait renverser le gouvernement pour montrer sa force.
On est obligé de poser la question : condamner Marine Le Pen à l’inéligibilité est-ce une atteinte à la démocratie ? Non, elle a enfreint la loi, détourné à ses fins de l’argent européen. Pouvoir devenir présidente n’est pas une excuse, un permis d’outrepasser les règles applicables aux autres. Et un Gérald Darmanin, qui estime qu’il serait « profondément choquant que Marine Le Pen soit jugée inéligible » qu’il ne faut combattre que dans les urnes , ne fait que de la récupération, il aimerait attirer vers lui les électeurs du RN…
Et l’on pense aussi à Donald Trump, le président aimé des militants d’extrême droite : condamné, poursuivi dans de nombreux procès, il a été élu triomphalement. Pourquoi pas Marine ?
Un nouveau combat politique est engagé…