« La France ne laissera jamais personne, ni aujourd’hui, ni demain, remettre en cause la stabilité et l’intégrité du Tchad, » a promis le président français à N’Djamena où il assistait aux obsèques d’Idriss Déby Itno. « La France sera également là pour faire vivre la promesse d’un Tchad apaisé ». Son ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian s’était montré plus réservé la veille en déclarant qu’ « il faut être très vigilant » sur le comportement du conseil militaire de transition et sa marche vers la démocratie. Démocratie: un mot, un objectif qui revient depuis longtemps dans le discours français sur l’Afrique et notamment à propos de ce Tchad à l’avenir incertain. Un mot qui se heurte à ce concept de « realpolitik ». Deux mots qui s’opposent souvent.
Souvenez-vous et faites le parallèle: 20 juin 1990, La Baule et 28 novembre 2017, Ouagadougou. Il y a un peu plus de trente ans, François Mitterrand évoquait les chances de l’Afrique et souhaitait que ses dirigeants lancent un processus démocratique appuyé sur le multipartisme. Le Tchadien Hissène Habré n’écoute pas et Paris le lâche au profit d’Idriss Déby qui avait fait allégeance et promis. Le fuyard de 1989 prenait le pouvoir et préférait l’autoritarisme à la démocratie. Il y a trois ans et demi, Emmanuel Macron s’emballait pour l’avenir de l’Afrique et lui demandait de « rendre la démocratie et l’Etat de droit irréversible ». Vive les droits humains, la justice, la liberté de la presse, l’éducation, l’émancipation des filles. Le président français ne manquait pas de rendre hommage à Idriss Déby.
François Hollande savait que le Tchadien n’était pas l’ami idéal, mais sans lui pas de Serval ni de Barkhane dans le Sahel contre les djihadistes. La realpolitik plus forte que la démocratie. Cependant, la France avait déjà marqué sa désapprobation et, cette fois, n’a pas soutenu celui qui devenait son ex-ami alors qu’elle avait fait échouer les attaques précédentes. On aimerait croire qu’Emmanuel Macron a mis les points sur les i avec Mahamat Déby, tenté apparemment par un pouvoir solitaire.
A N’Djamena, l’opposition comprend pourquoi Paris a soutenu Idriss Déby. Mais s’il le fallait, notamment « pour la stabilité de la sous-région »; elle souhaite, par la voix de François Djékombé , de l’Union sacrée pour la République, que la France soit plus regardante à l’égard du pouvoir et plus proche du peuple qui souffre. Un nouvel équilibre à trouver. Du donnant-donnant.