Les bombes tombent toujours sur Gaza et aucun indice ne permet de penser que la résolution votée par le Conseil de sécurité de l’ONU et réclamant un cessez-le-feu immédiat sera appliquée durant ce mois de Ramadan. D’ailleurs, était-ce vraiment le but des Etats-Unis qui se sont abstenus ?
Joe Biden est « coincé » entre deux impératifs : soutien total à Israël, mais opposition à Netanyahou, et besoin absolu des voix des Américains musulmans pour espérer une réélection le 5 novembre prochain.
Le président américain connaît le Premier ministre israélien depuis une quarantaine d’années et les deux hommes n’ont jamais partagé les mêmes idées. Aujourd’hui, Joe Biden, comme une bonne partie de son administration, pense que Benjamin Netanyahou cause du tort à son pays. S’il soutient le droit d’Israël à se défendre contre le Hamas, il lui reproche de le faire d’une mauvaise manière qui isolera durablement l’Etat hébreu, de plus en plus désigné comme coupable.
En laissant passer la résolution, la Maison Blanche entend avertir Netanyahou, le déstabiliser, créer les conditions d’une alternative. « Bibi » joue pour lui et contre son pays. Ce qui ne peut que satisfaire le Hamas, le Hezbollah, l’Iran…
Joe Biden regarde aussi les sondages et l’état d’esprit des électeurs. Les Américains musulmans ne sont pas très nombreux, autour de quatre millions, mais leur poids électoral, conséquent, peut faire pencher la balance car ils sont surtout présents dans les Etats-clés. Il y a quatre ans, Biden a gagné le Michigan de 154 000 voix ; l’Etat compte 200 000 électeurs musulmans. En Géorgie et en Arizona, il n’avait qu’une dizaine de milliers de voix d’avance. En décembre dernier, des dirigeants de la communauté musulmane de plusieurs États clés se sont réunis à Detroit sous une bannière proclamant : « Abandonnez Biden, cessez-le-feu maintenant ». Le soutien des Américains musulmans aux démocrates s’est effondré. Pas certain du tout qu’ils votent pour Trump, mais leur abstention affaiblirait Biden.
En laissant passer la résolution, le président espère regagner un peu de temps et de confiance. Elle est, bien sûr, contraignante, mais il faudrait un nouveau vote pour prendre des sanctions, des mesures pour son application. Et la Maison Blanche n’oublierait pas d’accuser aussi le Hamas de ne pas la respecter en ne libérant pas les otages…