Depuis son élection à la présidence, il y a près de trois ans et demi, Kaïs Saïed répète qu’il gouverne pour et par le peuple et qu’il ne tolérera rien qui le détournerait de son chemin. N’écoutant que « Dieu et la voix du peuple », le résident de Carthage refuse de se soumettre au FMI avec des arguments que chacun ne peut que partager : « le monde, le FMI doivent comprendre que l’être humain n’est pas qu’un chiffre (…) Les injonctions venant de l’étranger et qui créent davantage d’appauvrissement ne sont pas acceptables. Nous devons compter sur nous-mêmes ».
KS aurait-il viré maoïste ? « Produire suffisamment de nourriture et des habits avec nos propres mains » recommandait Mao dès 1939. Il disait aussi « partir des masses pour retourner aux masses ». C’est précisément ce qu’ambitionne de faire l’ancien prof de droit constitutionnel.
Fort bien, mais une question se pose quand on regarde le pays qui vit sa plus grave crise économique depuis son indépendance, une crise qui chagrine même le pape François : Kais Saïed est-il devenu sourd ? Son peuple va mal et le crie. Il n’entend pas sa souffrance ni les appels des alliés européens et américain qui ne s’alarment pas pour le plaisir, pour s’ingérer.
Le nouveau disciple de Mao serait-il attiré par le nouvel axe Moscou-Pékin recommandé chaudement par l’ami algérien qui aide à passer les fins de mois difficiles et qui mettrait sur pied « une initiative algérienne pour venir en aide à la Tunisie » ? Tous les amis traditionnels, et au-delà, tous les pays qui partagent beaucoup avec les Tunisiens, à commencer par la France et l’Italie sont prêts à aider si Tunis commence par s’aider.
En ce 9 avril, le président a promis de « rester fidèle aux martyrs qui ont sacrifié leur vie pour que la Tunisie soit libre et souveraine ». Espérons qu’il associait dans cette évocation les femmes qui avaient commencé le combat la veille, le 8 avril, et qui sont toujours à l’avant- garde dès qu’il s’agit de défendre le pays.
« L’avenir est radieux, mais la route est sinueuse » insistait Mao. Pour ne pas déraper dans les virages, KS doit ouvrir les yeux et écouter les avertissements qui le préviennent des dangers de sa route. Ne pas croire qu’il suffirait que « l’étranger rende l’argent qui nous a été volé » ou détourné depuis 2011 pour que les soucis s’envolent. Ne pas construire sur des chimères. Mais méditer, peut-être sur ces mots curieux et osés du Grand Timonier : « C’est quand la merde et le pet sont sortis que le ventre est soulagé ».