En se réunissant pour discuter d’Israël et de ses guerres au Liban, à Gaza et en Cisjordanie, les membres du Conseil de sécurité de l’ONU auront-ils à l’esprit les paroles du président turc Erdogan qui le qualifie de « structure dysfonctionnelle » et le questionne : « Conseil de sécurité, qu’attendez-vous pour prévenir le génocide à Gaza et pour dire ’stop’ à cette barbarie ? Tout comme Hitler a été stoppé par l’alliance de l’humanité il y a 70 ans, Netanyahou et son réseau d’assassins doivent être également stoppés par l’alliance de l’humanité ».
On ne peut qu’approuver la condamnation de l’Etat hébreu, mais ces mots forts sont aussi …creux. Netanyahou a encore répété ce mercredi qu’il ne s’arrêtera pas et l’on sait que le Conseil de sécurité n’arrive pas à se mettre d’accord, droit de veto oblige.
Depuis des années, on parle de modifier la composition du Conseil de sécurité, d’accorder le statut de membres permanents à des pays d’Afrique et d’Asie -qui se disputent pour en être. Mais élargir n’améliorera pas le fonctionnement, le « hic » réside dans le droit de veto. Le donner à davantage de pays, le soumettre à une majorité qualifiée ne résoudra pas totalement le problème s’il n’ y a pas de mesures décidées pour appliquer les décisions. Envoyer une force, genre casques bleus, retirer le droit de vote du pays récalcitrant, prononcer des suspensions temporaires ? Autant de possibilités difficiles à concrétiser…
D’autre part, et au-delà de la pertinence que chacun attribuera au discours d’Erdogan, on peut s’interroger sur sa crédibilité. Il y a un an, lors de cette même assemblée générale onusienne, Erdogan et Netanyahou, en bons amis, se réjouissaient de leurs bonnes relations qu’il fallait encore faire progresser et discutaient du futur accord de normalisation entre Israël et l’Arabie saoudite. Erdogan a une sincérité à géométrie variable, il ne pense qu’à sa Turquie, qu’à l’ empire qu’il rêve de reconstruire et ne prend de décisions, de positions qu’en fonction de ce qu’elle peuvent rapporter en termes d’influence, de commerce, d’investissements.
Netanyahou, un nouvel Hitler, répète Erdogan. Erdogan, un autre Netanyahou, un autre Hitler pourraient se plaindre les Kurdes. En 1920, le Traité de Sèvres leur promettait un Etat au grand dam de Mustafa Kemal Atatürk. Trois ans plus tard, le traité de Lausanne mettait fin à leurs espoirs et consacrait la République turque.
Au début des années 2000, Recep Tayyip Erdogan qui arrivait au pouvoir et lorgnait vers l’Europe se montrait pro-kurde avant de s’allier aux nationalistes qui l’aidaient davantage à consolider sa mainmise sur le pays. Les Kurdes devenaient l’ennemi à abattre, des terroristes. Chaque jour, l’armée turque bombarde les camps du PKK en Irak…
Où est la cohérence du président turc ? Il affirme combattre des terroristes, Netanyahou aussi. Lequel a raison ? Aucun ?