Ne resterait-il que « la dernière option sur la table », c’est-à-dire celle de la force ? Les médiateurs de la Cédéao conduits par l’ancien président nigérian Abdulsalami Abubakar ont dû , en effet, rebrousser chemin, empêchés de voir le général putschiste Tiani et le président renversé Bazoum. Le délai expire dimanche et les militaires, qui se sont emparés du pouvoir, ne cessent de faire monter la tension, s’affirmant même prêts à une « riposte immédiate » à « toute agression ».
On n’en n’est pas encore là et les tractations plus ou moins secrètes vont continuer. Moscou, Alger et Washington et autres capitales conseillent aux putschistes d’éviter le pire. En attendant dimanche et, soutenus principalement à Niamey par le M62 -62, en référence à 1962, année de l’indépendance- activée par la Russie et ses usines à trolls, le général Tiani et les siens tentent de rejeter toute responsabilité sur la France incapable de vaincre les djihadistes.
Certes, la France est en échec. Les soldats de Serval, puis de Barkhane, n’ont pu, malgré de réels succès, stopper la progression des terroristes au Mali et dans le Sahel. La France a trop soutenu des gouvernements pas vraiment appréciés des populations, a parlé de démocratie tout en s’accommodant des péripéties de la succession tchadienne ou des manquements de dirigeants « amis », a tardé à prendre en compte l’influence des réseaux sociaux et de la propagande russe auprès de la jeunesse africaine. Paris a ainsi perdu de son crédit et sa présence militaire a été plus ou moins perçue comme une occupation ou, comme inutile car peu efficace.
Cependant, il est faux de prétendre que la France perd aujourd’hui le Niger car ses militaires y sont venus après un vote des députés nigériens et non à la seule demande d’un président. On ne peut perdre que ce que l’on possède.
Si Paris doit se poser des questions sur ses rapports avec l’Afrique et son avenir sur ce continent, le Niger n’est pas une affaire française mais africaine. Déjà touchée par les coups d’Etat au Mali, au Burkina Faso et en Guinée, la Cédéao joue sa crédibilité. Elle est trop engagée pour céder dimanche aux putschistes. Mais l’usage de la force serait une solution détestable et lourde de conséquences, une victoire des djihadistes. Et tout cela parce qu’un général ne voulait pas être mis à la retraite ! D’ailleurs, si des soldats de la FAC, Force d’attente de la Cédéao, appuyés par l’aviation, intervenaient à Niamey, l’armée nigérienne soutiendrait-elle les putschistes ? Pas sûr… Rien n’est donc encore écrit. Sauf que la vraie crise, et pas seulement au Niger ou au Sahel, est celle de la démocratie en Afrique, de la gouvernance, de la participation de la jeunesse à la vie politique trop souvent confisquée par des groupes, des clans. Des systèmes de pouvoir à changer…