En dépit des coups de boutoir successifs qu’a essuyés la mouvance islamiste ces dernières années, le hijab (voile islamique), symbole, si l’en est, d’une société embrigadée, résiste et s’adapte. Dans certains pays comme l’Algérie, on assiste même à un rebond, sans que cela ne semble préoccuper aucunement les décideurs politiques.
En mars 2023, un collectif d’étudiantes d’une cité universitaire à Alger a organisé une cérémonie pour célébrer le passage de 150 filles au voile. L’image choque. On se croirait revenu au début des années 1990, quand la déferlante islamiste imposait des règles de conduite conformes à la charia dans les espaces publics. Comment expliquer ce regain d’engouement pour le voile?
Pour le sociologue et politologue Addi Lahouari, interrogé par Slate.fr, le port du voile ne doit pas être réduit à sa seule dimension religieuse. «C’est aussi, indique-t-il, un élément d’une dynamique socio-historique qui touche les pays musulmans où la tradition (à ne pas confondre avec la religion) n’autorise pas la femme à se montrer dans l’espace public.»
«La femme voilée, poursuit Addi Lahouari, veut être présente dans l’espace public dans le respect de la morale qui réprouve les rapports sexuels en dehors du mariage. En portant le voile, la jeune femme dit: je ne suis pas disponible pour une relation avec un homme si elle n’est pas conforme à la charia. Le voile est un morceau de tissu où se lit l’obsession de la société pour la thématique de la yajouz. Il est aussi la réponse au regard du prédateur sexuel potentiel sur une proie sexuelle potentielle. Lorsque ce regard diminuera d’intensité, lorsque la société, et donc l’État, donneront suffisamment de garanties à la femme dans l’espace public, le voile refluera», avance le chercheur. Mais, ajoute-t-il, il est également devenu un objet de mode.