C‘était pratiquement écrit : Joe Biden, en perte de vitesse avec une cote à 38% au mieux ne pourrait empêcher la défaite des démocrates aux élections de mi-mandat du 8 novembre. Traditionnellement, le camp au pouvoir perd alors du terrain et les démocrates, à égalité de sièges au Sénat, n’en n’ont que dix d’avance à la Chambre des représentants. La fin de mandat du président, déjà en difficulté en raison de l’inflation record et de son… âge, allait s’avérer bien difficile. Les sondages donnaient certes un résultat serré, mais toujours favorable aux républicains unis derrière un Donald Trump inoxydable et plus combatif que jamais.
La remise en cause du droit à l’avortement, les trop nombreuses tueries de masse qui révoltent une grande partie des Américains, l’élimination en Afghanistan du chef d’Al Qaïda et le vote des réformes sur le climat et la santé allaient faire renaître l’espoir dans le camp présidentiel convaincu que l’électorat pouvait réagir et dire non à des candidats trop réactionnaires. Et, sentant que le vent pouvait tourner, Joe Biden s’est lancé dans la bataille. Les candidats démocrates ne souhaitant pas vraiment son soutien, il est monté seul au créneau. L’endormi s’est réveillé à Philadelphie où il prononcé un discours d’une violence dont on ne le croyait pas capable : “Trump et ceux qui le suivent représentent un danger pour la démocratie. Ils applaudissent la colère. Ils se nourrissent du chaos. Ils ne vivent pas dans la lumière de la vérité mais à l’ombre des mensonges. Ils ne croient pas à l’Etat de droit. Ils ne reconnaissent pas la volonté du peuple. Face à cette idéologie de semi-fascisme, il faut sauver l’âme de l’Amérique.”
Immédiatement, les sondages changeaient : 47% pour les démocrates contre 44% aux républicains. L’espoir revenait d’autant que l’inflation baissait.
Donald Trump plongeait à son tour dans la bataille. Samedi soir, en meeting en Pennsylvanie, il dénonçait « «le discours le plus vicieux, haineux et diviseur jamais prononcé par un président américain» et insistait : «son discours n’était que haine et colère». «Le président des Etats-Unis, enfin le prétendu président des Etats-Unis, m’a déclaré la guerre. Et il a déclaré la guerre à la moitié de l’Amérique». « C’est lui l’ennemi de l’Etat ». Comme Biden, il appelait à « sauver l’Amérique ».
La guerre déclarée va se poursuivre, notamment à coups de publicités – sans doute des recettes record de 2,4 milliards de dollars – et de vidéos manipulées comme celle présentant Biden en Hitler… Dans certains Etats, les républicains poussent à coups de spots publicitaires des candidats sans expérience et trop extrémistes pour convaincre des électeurs modérés.
A deux mois du scrutin, les jeux sont loin d’être faits dans ces élections que Joe Biden veut transformer en référendum sur Trump. L’incertitude sur les résultats se traduit dans l’attitude de CNN qui se sépare de collaborateurs trop hostiles à Trump…
Cette guerre électorale se déroule dans un contexte totalement inédit, dans un pays plus divisé et fracturé que jamais. 43% des Américains – 53% des Républicains- questionnés par The Economist et YouGov ont affirmé qu’une guerre civile sur leur sol dans les dix prochaines années était probable.