Thameur Mejri a roulé sa bosse sur plusieurs continents et exposé aussi bien aux États-Unis qu’à Dubaï ou au Ghana. En Tunisie, il vient de mettre en mouvement sa première exposition institutionnelle avec l’appui de la Fondation Kamel Lazaar. Intitulée « States of Exception », cette collection sera présentée du 25 mars au 2 mai à la station d’art B7L9 à Bhar Lazreg.
Matthieu Lelièvre, commissaire de l’exposition, insiste dans son approche de la pratique artistique de Thameur Mejri, sur la relation que ce dernier instaure entre art et politique. Historien de l’art et conseiller artistique du Musée d’art contemporain de Lyon, Lelièvre analyse l’oeuvre ouverte de Mejri à l’aune des textes philosophiques de Michel Foucault, Jacques Derrida et Giorgio Agamben.
C’est à ce dernier que la notion d’état d’exception est empruntée à travers l’un de ses ouvrages récents. Ces états d’exception qui donnent son titre à l’exposition impliquent aussi bien une réflexion sur la domination qu’un processus de déconstruction de concepts comme la légitimité ou la démocratie.
Bien sûr, les créations de Thameur Mejri ne sont pas narratives ou platement figuratives. Au contraire, elles se nourrissent de ferments et de facteurs qui interagissent autant dans l’espace de la toile que dans celui de l’exposition. Pleinement expérimentale, l’exposition se présente en trois blocs successifs. Le visiteur découvre d’abord des toiles réalisées par l’artiste in situ au cours des deux dernières semaines.
Ce sont des tableaux de très grand format qui interpellent le regard et induisent une structuration/déconstruction de l’espace vital de la galerie d’art. Ensuite, l’on découvre des peintures et des dessins qui sont la matrice profonde de l’exposition et déclinent le plaidoyer esthétique et politique de Thameur Mejri. Enfin, le visiteur aboutit à un troisième espace qui reproduit l’antre de l’artiste, son atelier-laboratoire dans lequel se croisent musique, cinéma et œuvres philosophiques. Infinie, métaphoriquement ouverte, présentant des personnages désarticulés et en quête de gravité, la collection « States of Exception » a pour épicentre un état de siège permanent doublé d’une agitation endémique.
C’est dans cette instabilité chronique que l’artiste installe son dispositif très imprégné par les textes majeurs de Michel Foucault ou Gilles Deleuze. Le vernissage de l’exposition aura lieu aujourd’hui, jeudi 25 mars à 17h et se poursuivra jusqu’à 21h. Au programme, une conversation avec Thameur Mejri et Matthieu Lelièvre ainsi qu’un set de Noy Ära et ses rythmes cadencés.
Un programme culturel prendra le relais après trois jours d’exposition qui invitent le public à symboliquement entrer dans la tête de l’artiste. Une exposition à visiter pour mieux découvrir l’un des artistes tunisiens les plus en verve. Couvé par Selma Feriani Gallery, soutenu par la Fondation Kamel Lazaar, Thameur Mejri prend un essor remarquable qui, d’ailleurs, devrait le mener au printemps 2022 au Musée d’art contemporain de Lyon dont il sera l’invité