Finalement, l’outsider, souvent nommé mais aussi vite écarté, a gagné. Vu le fonctionnement de la Ve République et l’éclatement du paysage politique en trois blocs, il n’y avait pas de choix évident, faute de majorité. Michel Barnier, 73 ans, le Joe Biden Français qui a été le plus jeune député à 27 ans, a été ministre et a connu une belle carrière européenne – commissaire à Bruxelles puis négociateur du Brexit- était le moins incompatible. Un choix pragmatique , de par défaut.
La nomination de celui que Chirac surnommait « le moniteur de ski » ne change rien à la situation de la France , les blocages, revendications et lignes rouges des uns et des autres restent les mêmes. Il suffit de regarder les titres de la presse française pour comprendre. Si le Figaro voit dans l’arrivée à Matignon du Savoyard « le choix de l’apaisement », L’Humanité dénonce « un outrage », le mépris de la démocratie et du résultat des élections. La Tribune souligne « le choix d’une droite assumée » et Le Monde voit « le Rassemblement national en arbitre du choix », rejoint pour une fois par Libération qui titre « Approuvé par Marine Le Pen ».
La Croix évoque la suite problématique : « Et maintenant, le gouvernement ». Les Echos promettent « des changements et des ruptures », mais la presse régionale, plus pragmatique que politique se demande « jusqu’à quand » et décrit un Premier ministre « déjà controversé », « en sursis ».
Michel Barnier sait l’ampleur du défi et a commencé à recevoir des chefs de partis qui répètent leur opposition absolue ou indiquent que leur soutien dépendra du programme, des projets : budget, pouvoir d’achat, travail, retraites, immigration, proportionnelle…
Connu pour ses talents de conciliateur et son respect de tous, le nouveau Premier ministre va reprendre son mantra du Brexit : « Keep calm and negociate ». Le président Macron, qui joue en partie son avenir, laissera une grande liberté à Michel Barnier qui a promis et de « dire la vérité » et de nouvelles méthodes. Cela suffira-t-il pour dépasser les clivages ?
Le hic, c’est que la France actuelle adhère à des vérités différentes. Aujourd’hui, la France, c’est « attendre et voir ».