A ses demandes pressantes et répétées de chars, d’avions , de missiles et de munitions, Volodymyr Zelensky ajoute une autre revendication qui interroge et divise : l’interdiction des athlètes russes et biélorusses aux Jeux Olympiques de Paris l’an prochain. Depuis un passé relativement récent, la politique a fait irruption dans le sport. On a vu des athèles prendre position, comme Cassius Clay -Mohammed Ali – qui a refusé d’aller combattre au Vietnam ou Tommie Smith et John Carlos qui ont levé le poing sur leur podium des Jeux de Mexico en 1968 en référence au mouvement Black power ou plus récemment des athlètes mettre un genou en terre pour saluer Blacks live matter… On a vu des pays boycotter les Jeux ou d’autres événements pour des raisons politiques, mais jamais, excepté en I948 pour les fauteurs de la deuxième Guerre mondiale, l’Allemagne et la Russie, des nations ont été exclues pour des motifs politiques. C’est le dopage massif de ses sportifs qui a privé la Russie de certaines compétitions.
La position du CIO est plutôt de faire participer les athlètes « propres » sous bannière neutre, olympique, comme à Tokyo en 2021 (Jeux d’été) et à Pékin (Jeux d’hiver) en 2022. Cependant, juste après le début de l’invasion, ce même Comité international olympique a souhaité que les représentants russes et biélorusses ne soient plus invités aux grandes compétitions. Une demande suivie par plusieurs fédérations – hockey sur glace, rugby, patinage, ski alpin et basket ont, par exemple, suivi cette ligne, imitées par les puissantes Fifa et UEFA.
Il y a quelques jours, le président ukrainien insistait : «Tandis que la Russie tue et terrorise, les représentants de cet État terroriste n’ont pas leur place dans les compétitions sportives et olympiques. La simple présence de représentants de l’État terroriste est une manifestation de violence et d’impunité et cela ne peut pas être couvert par une prétendue neutralité ou un drapeau blanc ». Malgré la recommandation de fin février 2022, il n’est pas certain du tout que le CIO, qui a évolué, suive Zelensky. Ce dimanche, Thomas Bach, son président, a affirmé à Courchevel où il assistait aux championnats du monde de ski que « Ce n’est pas aux gouvernements de décider ». Le 25 janvier, le CIO avait déclaré qu’« aucun athlète ne devrait être interdit de compétition sur la seule base de son passeport ». On pourrait, certes, exclure un sportif qui aurait explicitement pris parti pour Poutine et sa guerre.
Ce jour, Martin Fourcade, l’ex-champion français de biathlon, s’est exprimé en tant que membre du CIO et président de la commission des athlètes de Paris 2024 : « « Je crois vraiment dans les valeurs du sport, et je pense vraiment que personne ne devrait être interdit de compétition à cause de son passeport ou sa nationalité ». Pour lui, un athlète ne devrait pas être banni « parce que son président se comporte comme un fou ».
Volodymyr Zelensky est dans son rôle en luttant totalement contre Poutine, en tentant de convaincre le monde de le suivre, mais a-t-il raison en prétendant que la présence d’athlètes russes et biélorusses serait « signe de violence et d’impunité » et que « le Comité international olympique a besoin d’honnêteté. Une honnêteté qu’il a malheureusement perdue » ?
L’Ukrainien peut faire remarquer qu’il faut respecter les principes fondamentaux de l’olympisme qui stipulent que le sport sert à « promouvoir une société pacifique, soucieuse de préserver la dignité humaine ». Seuls les pays vraiment démocratiques pourraient donc participer ? Il faudrait aussi parler de l’interdiction de toute « démonstration religieuse ». L’article 50 de la charte olympique stipule en effet : “Aucune sorte de démonstration ou de propagande politique, religieuse ou raciale n’est autorisée dans un lieu, site ou autre emplacement olympique.”
Il faudrait aussi répondre à la question de savoir si Poutine représente toute la nation russe, tous les Russes ?
Alors, Volodymyr Zelensky ou Martin Fourcade ?