On a beau croire être habitué aux discours du président de la république, à ses envolées lyriques, à ses formules à l’emporte-pièce et à son style tendu et pompeux, on est pourtant toujours surpris et étonné.
Lundi, devant le Conseil de la sécurité nationale, médusé, le Président de la république a franchi un nouveau palier du surréalisme politique.
Lui, Président d’une république au régime politique semi-parlementaire, censé donc être une personnalité morale rassembleuse et unificatrice.
Lui, Président, devant poser des actes et tenir un langage allant dans le sens de l’unité nationale, notre bien historique le plus précieux.
Lui, Président, symbole de l’élévation au-dessus des contingences et des luttes partisanes.
Lui, Président, supposé inspirer calme sérénité et confiance en l’avenir.
Lui, Président, appelé à être le point de repère dans une géographie politique sociale instable.
Eh bien, Kais Said n’en a cure, de tout cela. Un œil sur le Facebook et un œil sur 2024,il avance à pas de l’oie, bousculant sur son passage usages et traditions de la république et faisant fi du respect dû au prestige de l’Etat et à ceux qui la représentent au plus haut niveau, parmi lesquels le Président de l’Assemblée des représentants du peuple, le Président du gouvernement et les plus haut gradés de l’armée-excusez du peu!
Mais Kais Said ne voyait que sa personne. Et comme à l’accoutumée il a sorti le même discours pour dénoncer des complots et des comploteurs qu’il ne nomme jamais. Pour menacer du recours à des armes juridiques imparables. Et pour donner, comme à chaque fois, une leçon magistrale en droit constitutionnel en se posant comme le seul interprète de la Constitution. Une constitution qu’il n’hésite pas de rejeter publiquement.
Comme d’habitude, dirait-on. Seulement cette fois, Kaïs Saïd est allé plus loin encore, en annonçant son refus du remaniement ministériel proposé par le Président du gouvernement et en appelant à mots à peine couverts à la sédition. Simple coïncidence? Au moment où devait se dérouler le débat parlementaire sur le remaniement ministériel, un rassemblement populaire est organisé depuis la Cité Ettadhamen si proche du Président.
C’est quoi ça? Un début d’exécution d’un plan subversif, ou un simple jeu du Président pompier pyromane?