C’est, je crois, un politique français-Lionel Jospin si ne m’abuse-qui le disait: « un remaniement c’est comme une dévaluation, ça s’annonce toujours après ». Même dit pour rire, le mot ne manque pas de sens.
En effet, un remaniement ne peut pas être une simple modification de la composition du Gouvernement ou le changement de quelques postes ministériels, aussi importants soient ces postes. C’est bien plus que cela, un remaniement.
C’est un moment important dans la vie d’un pays où le Chef du Gouvernement décide de réparer le manquement ou carrément la faillite dont sont rendus responsables les ministres qu’il décide de changer. Dans le cas d’espèce, le remaniement s’imposait depuis quelques semaines déjà après la révocation de trois ministres, suite à des fautes graves de violation du principe de la solidarité gouvernementale( le ministre des Affaires culturelles et le ministre de l’Intérieur), ou d’implication dans une affaire de corruption (ministre de l’Environnement).
Mais un remaniement peut être aussi, et c’est manifestement le cas, une tentative de briser l’isolement dans lequel s’est enfermée son équipe, essuyant les feux, sans cesse grandissants, de la critique. L’actuel gouvernement ayant été formé dans la précipitation, pour parer au plus pressé, après l’éclatement du scandale du conflit d’intérêt dans lequel s’est mouillé l’ex-Président du Gouvernement, El Yès Fakhfakh; Hichem Mechichi devrait donc chercher, à travers ce premier remaniement, l’équipe solide et capable d’affronter les turbulences de toutes sortes, économiques, sociales, politiques et bien sûr sanitaires que rencontre le pays.
Pour résumer, nous dirions que Mechichi a besoin d’effectuer ce remaniement pour plus d’une raison. Pour donner, d’abord, un bon punch à son équipe gouvernementale, qui, manque d’expérience politique aidant, semble donner l’impression de céder sous les coups d’une opinion publique exacerbée par des les difficultés du quotidien et le poids réel et moral de la pandémie.
Pour, ensuite, comme dans tous les remaniements, gagner du temps et respirer un coup. Et pour voir plus clair dans une situation soumise à des changements rapides, tant sur le plan national, qu’international. Mechichi se doit de clarifier sa politique, préciser son approche, définir ses objectifs. Le remaniement est le bon moment.
Mais ce remaniement est aussi et surtout l’occasion espérée pour Mechichi de s’émanciper de son mentor Kaïs Saïd, devenu par trop intrusif et encombrant, dérangeant presque. C’était prévisible, voire inévitable. Tous les présidents ne sont pas Beji Caïd Essebsi, et l’actuel locataire de Carthage n’est pas du genre à se contenter de ce que lui offre la Constitution. D’où la rupture entre les deux hommes qui était inévitable. Ce premier remaniement va la sceller.
Reste à savoir maintenant quelle ampleur va prendre le remaniement. Une chose est sûre cependant: devant être forcément technique, vu le caractère technocrate du gouvernement, ce remaniement sera assurément et immanquablement politique