Depuis deux ans et demi une guerre d’attrition, de lourdes pertes, mais peu d’actions marquantes qui font les gros titres de la presse. Et puis voilà, l’état-major ukrainien relance la guerre de mouvement en réussissant ce que l’on croyait impossible : l’invasion de la Russie. Le crime majeur aux yeux de Poutine qui promettait le pire à celui qui oserait violer le sol sacré de la mère patrie. Et rien n’a suivi. Le Kremlin a d’abord gardé le silence avant d’ordonner de chasser les Ukrainiens avant le 1er octobre sans pour autant envoyer des troupes combattantes aguerries.
On assiste à deux guerres, deux stratégies différentes. Dans le Donbass, les Russes poursuivent leur progression vers Pokrovsk, « la porte d’entrée de Donetsk » un nœud ferroviaire et routier important pour l’approvisionnement de ses troupes. La situation est « extrêmement difficile » reconnaît le président ukrainien. Toujours la même disproportion sur le terrain : un soldat, épuisé, de Kiev pour quatre de Moscou, dix obus russes tirés pour un ukrainien. Près des lieux de combat, le moral des Ukrainiens est en baisse ainsi que la cote du président.
Zelensky raisonne autrement et porte la guerre directement chez l’ennemi. En contrôlant plus de 1200 km² et une centaine de localités dans la région de Koursk, en s’avançant aussi dans les environs de Belgorod, il entend montrer aux Russes la réalité de la guerre et prouver que rien n’est encore joué, que les nouveaux missiles ukrainiens dont celui à longue portée, le Palianytsa, peuvent provoquer de gros dégâts…
Ce coup militaire et psychologique fait partie, affirme-t-il, du « plan pour gagner en 2024 », du « plan de victoire » qu’il va présenter ce mois de septembre aux Américains et à tous ses alliés. Il entend « forcer la Russie à mettre fin à la guerre », à quitter les oblasts annexés mais pas conquis, à laisser l’Ukraine adhérer à l’Otan et à l’UE. L’ambition est également de mettre une pression diplomatique mondiale sur Moscou en organisant un deuxième sommet de paix dans un pays du « sud global ». Projet formellement rejeté par la Russie : « Si l’Occident souhaite normaliser la situation en Europe, il doit s’asseoir à la table des négociations sans la paperasserie à la ‘formule Zelensky’ » a lancé, mardi, Serguei Lavrov.
Et, pour prouver que tout va bien, le Kremlin a déclaré ce vendredi ne pas avoir « d’inquiétude » quant à une éventuelle arrestation de Poutine, visé par un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale lors de sa visite prévue le 3 septembre en Mongolie, État membre de la CP censée être obligée de l’arrêter une fois sur son territoire.
Tout cela dit, et même si le rapport de force est modifié dans les mois à venir, il est plus qu’improbable que la guerre puisse se terminer cette année…