« Le machin qu’on appelle l’ONU ». Cette formule souvent répétée a été prononcée le 10 septembre 1960 par le général de Gaulle qui refusait l’envoi de casques bleus au Congo et que l’on se mêle de sa politique de décolonisation. Quelques années plus tard, il appréciait cette organisation qui lui permettait de contrer les Etats-Unis et où les pays africains décolonisés le suivaient. De machin, l’ONU devenait opportunité.
Avant que le général ne s’énerve, le deuxième secrétaire général, Dag Hammarskjöld, qu’il n’aimait pas, avait affirmé que « l’ONU n’est pas là pour nous apporter le paradis, mais pour nous éviter l’enfer ». Aux yeux de beaucoup, les Nations unies ont échoué : les guerres sont toujours là, la paix est incertaine. L’ONU resterait donc un « machin » qui ne sert à rien, une organisation bloquée en raison du droit de veto accordé aux cinq membres permanents du Conseil de sécurité. Aucune décision contraignante ne peut être prise si les Etats-Unis, la Chine, la Russie, la Grande Bretagne ou la France s’y opposent. Mercredi, Volodymyr Zelensky a attaqué fort : « Le droit de veto aux mains de l’agresseur bloque l’Onu. Il est impossible d’arrêter cette guerre car tous les efforts font face au veto de l’agresseur ou de ceux qui le soutiennent ».
On peut se demander si la Russie aurait respecté une décision onusienne, si les Nations unies avaient envoyé des casques bleus. Moscou détient l’arme atomique… D’ailleurs, il n’y a pas que la Russie à brandir et utiliser son droit de veto. Israël ne craint pas grand-chose sous l’aile de son protecteur américain…
Oui, le conseil de sécurité est bloqué, l’ONU est impuissante. Son secrétaire général, Antonio Guterres, ne le cache pas : « «Le monde a changé. Nos institutions n’ont pas changé, a déclaré Guterres dans son discours d’ouverture de l’Assemblée générale. Nous ne pouvons pas traiter efficacement les problèmes tels qu’ils sont si les institutions ne reflètent pas le monde tel qu’il est. Au lieu de résoudre les problèmes, elles risquent d’en faire partie.»
Il faut donc réformer l’ONU. Une volonté exprimée depuis des années et qui n’aboutit pas. On peut augmenter le nombre de membres du conseil de sécurité, y faire entrer l’Afrique, l’Afrique latin, l’Inde… mais le problème est bien ce droit de veto. Comment le modifier ? Peut-on le supprimer ?
Cela dit, et même si le conseil de sécurité doit être à l’image du monde, l’ONU n’est absolument pas un machin inutile. Cette organisation reste le seul forum où tous les pays peuvent échanger, prendre la parole, proposer, critiquer, condamner, être entendus. Les ennemis peuvent s’y rencontrer discrètement, des relations peuvent se nouer.
Et il ne faudrait pas oublier la quinzaine d’agences des Nations unies qui travaillent et servent le monde comme l’Unesco, la FAO, l’AIEA, la Banque mondiale, l’OMS ou l’Unicef…
Dans notre monde en mutation à la recherche d’un nouvel ordre, d’un autre équilibre, d’autres organisations ou groupes de pays -G7, G20, G77, Brics, OCS…- cherchent à faire entendre leur voix, à s’imposer. Mais ces « machins » ne sont pas à la hauteur de l’original.