En apprenant que le président réélu allait passer quelque temps à la Lanterne, près de Versailles, l’insoumis Alexis Corbières n’a pu s’empêcher de penser au chant révolutionnaire de 1790 qui appelle à pendre les aristocrates aux poteaux soutenant les lanternes. Pas d’appel au meurtre, bien sûr, mais un goût de la révolution rêvée par Jean-Luc Mélenchon. Et une traduction de l’ambiance dans laquelle les oppositions ont accueilli le résultat de la présidentielle. 58,54% contre 41,46% : Emmanuel Macron a remporté une nette victoire sur Marine Le Pen. Une victoire que ces oppositions, que tous les battus veulent contester et remettre en cause dans les urnes des législatives des 12 et 19 juin. Peut-être aussi dans la rue comme lors des quelques manifestations hostiles de dimanche soir et peut-être violentes du 1er mai.
Pour Mélenchon et Le Pen, les législatives doivent rimer avec cohabitation. Le mécontentement, la colère doivent primer sur la logique du quinquennat faite pour que l’élu ait, dans son élan vainqueur, la majorité à l’Assemblée nationale. Les insoumis visent une union-soumission des gauches autour de leur leader et de leur programme, une répartition des candidatures en fonction des résultats du premier tour. Pratiquement inacceptable pour les socialistes et les communistes mieux implantés que les insoumis et aussi pour les écologistes qui réclament la prise en compte de leur résultat aux Européennes. Difficultés semblables à l’extrême droite où le RN, vexé par les propos de Zemmour sur la huitième défaite consécutive des Le Pen, ne souhaite pas d’accord avec reconquête mais seulement avec quelques-uns de ses membres. Nul ne semble vraiment croire aux chances des extrêmes de dominer la chambre des députés. Au RN, on rêverait au moins d’un groupe parlementaire, au mieux de 50 à 60 députés.
Emmanuel Macron, entré « dans sa phase huître » à la Lanterne réfléchit peut-être à organiser lui-même sa cohabitation en concoctant un gouvernement gauche-droite. Élu par la gauche il y a cinq ans, il avait nommé à Matignon un homme de droite. Réélu par la droite, il choisirait son « second » à gauche et s’efforcerait de mettre sur pied une nouvelle coalition à plusieurs pôles. « L’invention collective d’une méthode refondée »… Pour réussir, il devra vite rassurer les Français sur le pouvoir d’achat, les hausses des minimas sociaux, des pensions de retraites, la revalorisation des traitements des fonctionnaires et enseignants. Rassembler au-delà de son score de 38,5% des inscrits. Pompidou avait fait moins bien, il a quand même été un bon président…