« Là où je vais, on me demande de l’argent, partout. C’est très choquant. C’est grave » déplore Mustapha Lakhssam. l’ancien champion du monde de kick-boxing qui est candidat à ces élections. Plusieurs partis accusent le RNI, le Rassemblement national des indépendants, d’acheter les voix à coups de dirhams. Une vieille habitude qui a la vie dure. Le RNI est dirigé par Aziz Akannouch, ministre de l’Agriculture et, l’homme d’affaires parmi les plus riches du pays. En deux phrases, le royaume est schématiquement, rapidement décrit: une élite fortunée, des habitants dans le besoin, un roi de plus en plus riche, un peuple pauvre…
Le Maroc peut se targuer de grandes réussites, d’être présent dans de nombreux domaines comme l’automobile et l’aéronautique, d’avoir des ports enviés, des autoroutes, des TGV. Mieux que les pays de la région. Mais l’autre face de ce Maroc, ce sont ses campagnes au développement trop lent où l’on a encore pu perdre la vie lors de bousculades provoquées par des distributions alimentaires…395 députés à la chambre des représentants, 31 000 élus communaux et régionaux le même jour: ces élections du 8 septembre constituent une première. Ce soir, en vertu de la loi, davantage de femmes seront élues et la répartition des sièges étant basée sur le nombre d’inscrits et non plus de votants, l’émiettement des partis représentés devrait être plus grand. Le riche RNI va-t-il détrôner les islamistes du Parti de la Justice et du développement qui a gagné en 2011 et en 2016 mais qui a déçu les électeurs. Le parti du chef du gouvernement Saad Eddine El Otmani n’ a pas tenu ses promesses, notamment celle de réduire les inégalités sociales. Et il a dû s’incliner face à l’établissement de relations avec Israël dont il ne voulait pas. Pareil sur d’autres dossiers comme ceux de la place du français à l’école ou le cannabis. Et c’est là une autre caractéristique du royaume chérifien: les ministères régaliens sont confiés à des proches du roi et c’est au palais royal que Mohammed VI prend les grandes décisions avec ses conseillers. Les élections ont le mérite d’exister et sont réellement démocratiques. Elles fixent les rapports de forces – ce qui pourrait avoir de l’importance si le RNI vainqueur voit le Parti Authenticité et Modernité s’allie avec le PJD dans l’opposition- mais la ligne reste royale. Quelque soit le résultat, elle est déjà écrite: la chambre des représentants aura pour mission de mettre en œuvre le « nouveau modèle de développement » rédigé, hors du parlement par une commission nommée par le roi et adoptée en mai dernier. Il prévoit notamment le doublement du PIB par habitant d’ici à 2035 et la réduction des inégalités. Aujourd’hui, « les 10 % de Marocains les plus aisés concentrent encore 11 fois plus de richesses que les 10 % les plus pauvres ». Le Maroc, pays attachant, ne sera plus demain soucieux davantage de son image que du bien être de son peuple.