Nabil Karoui, actuellement en prison, est le président du parti Qalb tounes. Détenant 38 sièges à l’ARP, ce parti est donc une voix qui compte dans le débat politique.
Pourtant tel un bateau ivre, voilà que ce parti sans leader se retrouve sans boussole ne sachant réellement où prendre ses marques, où se positionner et encore moins faire ce qu’il était en devoir de faire : créer le nécessaire équilibre politique.
En effet, un équilibre entre ces « Tunisies » qui s’opposent, se combattent : la Tunisie qui se réclame d’avant 2011 et la Tunisie qui se dit révolutionnaire.
Muets politiquement, portant les fers de l’inaction, ils n’ont été que les spectateurs, aux premières loges, des dernières péripéties perpétuées à l’ARP : agressions, diffamations, calomnies en tout genre … A peu près tout ce qui est contraire au dialogue politique et au régime parlementaire.
Mais comme en politique aussi le malheur des uns fait le bonheur des autres, il y a un grand gagnant dans cette histoire : Kais Saied.
Le président de la République, suit tranquillement son chemin, surfant sur sa vague populiste et condamnant à coup de déclarations enflammées cette Tunisie de la « corruption et du fric » plutôt disons-le, représentée par son ancien adversaire Nabil Karoui.
Et oui, c’est que la Tunisie à travers ce duel entre Carthage et Mornaguia présente deux conceptions de la politique opposées qui se côtoient mais ne se rencontrent pas: libérale, mondialisée versus conservatrice et panarabique.
Si l’élection présidentielle a tranché, devons-nous pour autant ignorer les voix de l’autre majorité ? Et ainsi creuser toujours plus le fossé idéologique qui nous désunit ?
Kais Saied, ne semble pas montrer beaucoup de « grâce présidentielle » envers ses opposants. Il ignore le président du gouvernement, paralysant quasiment le pays, n’hésite pas à faire de ses voyages à l’étranger une occasion pour gêner son autre adversaire le président de l’ARP et s’octroyant par interprétation constitutionnelle toujours plus de pouvoir.
En attendant que la justice se prononce, Nabil Karoui croupit en prison. Il commence peut-être à assister au détricotage de sa formation politique annoncé par la démission de Yadh Elloumi, figure de proue de ce parti. Le Président Kais Saied serait-il en passe de réussir, en devenant un hyper président en attendant de disposer d’un parti politique qui viendrait peut être supplanter Qalb tounes ?
Ce n’est pas encore sûr car il lui faudra triompher d’Ennahdha, qui reste le parti le plus implanté dans le pays.