Réunis ce samedi au Ghana, les chefs d’état -major de la Cédéao n’auront finalement à répondre qu’à une question : comment faire suffisamment peur aux généraux nigériens pour qu’ils rétablissent Mohamed Bazoum dans ses fonctions présidentielles ? Préparer la guerre sans avoir à sortir les armes.
Moscou, Pékin, Washington, le monde entier, à l’exception des putschistes maliens, burkinabés et guinéens réclament le retour à l’Etat de droit, la libération du président Bazoum détenu dans des conditions « inacceptables » et dont le sort inquiète.
Pour l’instant, le général Tiani n’entend pas céder, persuadé que la Cédéao n’osera pas aller jusqu’au bout de ses menaces. Il sait que de nombreux pays ne sont pas d’accord avec l’intervention militaire. L’Algérie voisine bien sûr, comme la Russie et la Chine, mais aussi les Etats-Unis soucieux avant tout de maintenir leurs positions dans le pays. Présents au Niger avant l’arrivée des militaires français – Paris, au contraire de Washington, défend l’option militaire- Washington y a installé sa plus grande base militaire après celle de Djibouti où les drones lui permettent de mener des opérations de renseignement et de surveillance au Sahel. Le Pentagone entretient aussi une base secrète à Dirkou, dans le nord où œuvrerait la CIA. Mais leur homme, le général Barmou, nommé chef d’état-major des armées, se rangerait désormais du côté des putschistes bien décidés à faire face.
Ils joueraient également la carte Bazoum : si vous intervenez, nous l’exécuterons et vous serez responsables de sa mort… D’ailleurs, la « force en attente » de la Cédéao, dont on ne connaît ni la composition ni les moyens, serait-elle en mesure de mener à bien sa mission ? Il faut de la technicité, du savoir-faire, de l’entraînement pour mener une mission de libération en plein ville dans une zone de 10 km² occupée par des forces déterminées. Les putschistes pourraient faire appel à la population, aux jeunes sensibles à la propagande russe anti- occidentale. La mort de civils aurait des conséquences incalculables mais terribles et durables. Et la population nigérienne, déjà pauvre, en serait la principale victime.
Dans cet imbroglio, ce casse-tête, ce « jeu » dans lequel les ambitions et attentes des acteurs diffèrent, le pire est possible. Toute la sous-région est menacée d’instabilité, de troubles. Les djihadistes pourraient sortir vainqueurs. Les généraux nigériens sont-ils conscients des conséquences de leurs actes?