Premier bateau à quitter un port ukrainien chargé de céréales, le Razoni tourne en rond au large des côtes turques. L’acheteur libanais a refusé la cargaison du fait du retard des conditions de livraison. On a du mal à comprendre, on ne comprend pas quand on sait que les habitants de Beyrouth et autres villes libanaises attendent des heures devant les boulangeries pour acheter un pain hors de prix.
Après avoir mis en garde contre un ouragan de famine, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres s’était félicité d’un accord qui apporterait un soulagement aux pays en développement « au bord de la faillite et aux personnes les plus vulnérables au bord de la famine ». Des mots, rien de vraiment concret.
Tous les jours, un, deux ou trois bateaux quittent Odessa, Tchornomorsk ou Pivdennyi. Pas un seul n’a mis le cap sur l’Afrique. Sans doute que l’Irlande, l’Angleterre et la Turquie qui raflent la majorité des cargaisons souffrent davantage… Et pas un gramme de blé n’a quitté les silos ukrainiens. Les 370 000 tonnes de produits chargés à ce jour comprennent principalement du maïs, un peu de soja, de l’huile et de la farine de tournesol. Il est vrai qu’il restait au plus cinq millions de tonnes de blé, mais quand même.
Vrai aussi que des mines sont toujours en mer, que les assurances sont chères et les équipages difficiles à recruter. Vrai encore qu’une question se pose : que fait l’Afrique ? Le Sénégalais Macky Sall n’aurait-il rien négocié de concret à Sotchi ? Il a fait sans aucun doute son possible mais il ne peut surmonter les « tares » africaines : les pays demandeurs de céréales et leurs organisations régionales comme la Cédéao se montrent à ce jour incapables de s’unir, de grouper des achats, de passer par des traders reconnus, de s’entendre avec Afreximbank, la banque africaine d’export-import… Chaque pays paye comptant ses commandes et les ports sont encombrés, mal gérés, gangrénés par la corruption. Et pourtant, les céréales ukrainiennes sont à prix bradés… Et les russes, où sont-elles ?
La récolte ukrainienne de blé, 20 millions de tonnes, va arriver ,et s’ajouter aux quelque 20 millions,surtout du maïs, en attente. Les trois ports exportateurs ont une capacité combinée de trois millions de tonnes par mois qui serait atteinte en octobre. Il en faudra des bateaux…. L’Afrique doit se bouger, s’organiser enfin…