Plus inquiétant encore que les bruits de bottes, les manœuvres militaires, la mobilisation de troupes et la menace de sanctions sans précédent, n’y a-t-il pas cette irrationalité qui semble planer à Moscou et à Washington. Jusqu’où iront Biden et Poutine pour ne pas céder, ne pas paraître faible aux yeux de leurs concitoyens. L’Américain qui traîne le retrait sans gloire d’Afghanistan et se débat dans ses soucis intérieurs, le Russe qui poursuit ses rêves de grandeur perdue et veut marquer l’histoire, ne cessent de faire monter la tension au risque de commettre la faute qui pourrait mener à une guerre dont ils ne veulent pas.
Au milieu, les Européens tentent de se faire entendre, mais contrairement à ce que Joe Biden prétend, ils ne sont pas d’accord entre eux, ce dont joue Poutine pour ne pas baisser ses prétentions, du moins pas encore. Emmanuel Macron et Olaf Scholz qui se sont rencontré mardi soir sont d’accord pour menacer la Russie de sanctions dont elle aurait du mal à se relever, mais, plus que la Grande-Bretagne qui s’aligne sur Washington, Paris et Berlin, avec les responsables bruxellois de l’UE, insistent sur la nécessité du dialogue que d’ailleurs les Etats-Unis et la Russie prennent bien soin de ne pas rompre. Trouver le chemin de la désescalade ne sera ni simple ni rapide car il est impossible de donner satisfaction à Poutine, de tirer un trait sur la désintégration de l’URSS. Il faudrait cependant cesser cette dangereuse dramatisation qui nuira à tous. Et aussi toucher à une question qui devient tabou, celle du rôle et des missions de l’Otan, fruit de la guerre froide qui a pris fin il y a trente ans.
En attendant, Biden et Poutine appliquent l’adage latin « si vis pacem, para bellum », « si tu veux la paix, prépares la guerre »…