Dans tout le pays, des Syriens fouillent les morgues à la recherche de disparus et retrouvent des corps torturés. A Damas, des femmes craignent pour leur liberté et se plaignent d’avoir été interpellées par des militants d’HTC qui leur auraient déclaré : « Vous êtes dans un État islamique, les femmes ne peuvent sortir qu’accompagnées de leurs frères ou de leurs maris. » Tous les abonnés au réseau syrien de téléphone ont reçu un message du nouveau régime qui promet « un nouveau départ pour construire un Etat solide, libre et juste ».
Le nouvel homme fort, Ahmed Al-Chara et son premier ministre Mohammed Al-Bachir veulent d’abord sécuriser, rassurer et stabiliser. Ils accueillent les envoyés occidentaux, discutent avec les Russes et les Iraniens qu’ils veulent tous convaincre de leurs bonnes intentions. Tous ces envoyés partagent les mêmes sentiments que les Syriens, entre doute et espoir. Les islamistes violents du Front Al Nosra qui ont sévi du côté d’Idlib ont -ils appris le sens des mots liberté et tolérance , y compris religieuse? Accapareront-ils l’économie, mettront-ils le pays et sa reconstruction à leur service ? Les pays amis, dont l’Algérie, redoutent une destruction du pays, une sorte de recolonisation de la part des Occidentaux, mais ils oublient que ces derniers n’y auraient aucun intérêt réel et qu’ils ont sans doute appris – les Américains- de leur cruel fiasco irakien ou afghan.
On voudrait voir la renaissance de la Syrie historique multi confessionnelle qui fut un des berceaux du christianisme avec saint Paul, on craint que l’idéologie des Frères musulmans, soutenue par la Turquie d’Erdogan, domine ce nouveau pays qui voit le jour. En attendant, les « libérés » d’Assad patientent, estimant que « ça ne peut pas être pire qu’avant ». La Syrie d’Assad n’était qu’une illusion entretenue par Moscou et Téhéran.
Le futur syrien ne sera pas démocratique au sens où on l’entend aux Etats-Unis, en France, dans l’UE. Le temps, l’histoire nous ont appris qu’on ne peut imposer un modèle par la force, mais la Syrie peut, doit aller vers un régime où le peuple aura son mot à dire par des voies électorales. Avant cela, il faudra mettre fin au conflit qui dure, trouver un terrain d’entente avec les Kurdes, vaincre l’ EI, régler les différends avec un Israël conquérant et agressif.