A Damas, dans leur palais, les Assad vivaient dans un luxe extravagant et des chaussures d’Asma, l’épouse du président, valaient 7 000 dollars. A une trentaine de kilomètres, des détenus marchaient sur des cadavres dans les « saloirs » de la prison de Sednaya où les pendus étaient conservés avant qu’il n’y en ait assez pour les charger dans un camion et les jeter dans des fosses communes. Les jours de pendaison étaient appelés « jours de fête » par les gardiens, les tortionnaires.
Plus de 100 000 personnes sont mortes depuis 2011 dans les geôles du pouvoir rapporte l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). Dans le même temps, le PIB du pays a été divisé par deux et la fortune des Assad a gonflé, notamment grâce au captagon.
Un rapport de l’ONG Amnesty International de 2017 évoque déjà « les exécutions de milliers de personnes » organisées « discrètement et méthodiquement » par les autorités syriennes. La violence des traitements dont sont victimes les personnes détenues s’apparente selon elle à une « extermination ». Les détenus étaient torturés et privés systématiquement de nourriture, d’eau, de médicaments et de soins médicaux.
Avec l’Ukraine, le conflit en Syrie « a été qualifié du plus documenté », indique le procureur Robert Petit, chef de la mission internationale des Nations unies pour la Syrie, chargé de la collecte des preuves de crimes de guerre. Les Syriens « ont documenté eux-mêmes, souvent au risque de leur vie, les exactions, la victimisation du peuple syrien. Ce sont ces éléments-là, ces témoignages-là, qui, au soutien des juridictions nationales dans plusieurs instances, fournissent et fourniront les preuves de ces crimes », assure-t-il, « nous avons 283 terabytes d’informations. Pour le moment, nous avons des méthodes et des processus qui nous permettent d’analyser et de cibler des éléments, que ce soient des auteurs, que ce soient des crimes emblématiques ou des éléments qui permettent d’établir des responsabilités »
La vérité sur le régime, que l’on soupçonnait, que l’on connaissait en partie, éclate au grand jour et met forcément en cause les pays amis des Assad. Comment pouvait-on soutenir cet homme qui au fil des ans s’est transformé en despote tortionnaire, pilleur avec les siens des richesses de son pays ?
Va-t-il profiter de sa fortune, estimée aux alentours de deux milliards de dollars, dans son exil moscovite. Depuis le temps de l’amitié avec Brejnev , les Assad ont investi en Russie et Bachar possède une vingtaine de résidence de luxe à Moscou, d’une valeur de 40 millions. Depuis des années, ils sont chez eux dans la capitale russe.
Une question se pose cependant : Poutine, qui l’a accueilli pour des « considérations humanitaires », sera-t-il longtemps bienveillant ? Il a lâché le Syrien dans l’espoir de préserver ses bases de Tartous et Hmeimim. Que fera-t-il si le nouveau pouvoir lui demande de le livrer ? S’il acceptait, quelle serait sa fiabilité aux yeux des Africains qu’il prétend protéger ?