Naguère en « état de mort cérébrale », comme l’affirmait avec raison Emmanuel Macron en novembre 2019, l’Otan a été ressuscitée par la volonté de Poutine de s’emparer de l’Ukraine, un pays qui, pour lui, n’existe pas, n’est qu’une terre russe. A Madrid, l’organisation atlantique, qui s’élargit à la Suède et à la Finlande, va adopter une nouvelle feuille de route pour répondre à cette « menace directe pour notre sécurité » que représente la Russie.
Un renforcement total pour maintenir le leadership occidental assimilé à la défense de la démocratie et de la liberté des peuples, et une aide accrue à l’Ukraine de Zelensky qui lutte précisément pour sa liberté. Même le président français, critiqué sur des soupçons de faiblesse envers Moscou, a martelé que « la Russie ne peut ni ne doit gagner » et que toutes les sanctions seraient appliquées avec fermeté.
A Volodymyr Zelensky qui ne cesse de réclamer un armement moderne, l’Otan a promis de nouvelles livraisons de blindés, d’obusiers, de lance-missiles multiples, de systèmes anti aériens… Une aide qui durera « aussi longtemps qu’il faudra »
Cependant, le ton pourrait avoir changé : la chaîne américaine CNN a rapporté une conversation entre des conseillers de Poutine qui estiment que l’armée ukrainienne n’est pas capable de mener des contre-attaques gagnantes et que Kiev devra peut-être faire des concessions, accepter de se voir amputer d’une partie de son territoire. Dans le même temps, Moscou faisait savoir que la guerre pouvait s’arrêter immédiatement si l’Ukraine capitulait, acceptait les conditions de Poutine. Il n’était pas question d’arrêter l’aide massive, de laisser le champ libre à Moscou, mais des doutes étaient émis. Des doutes qui correspondent à la situation sur le terrain où les soldats ukrainiens sont en grande difficulté, pas en mesure de remporter des succès majeurs.
CNN a été attaquée, traitée de poutiniste, de défaitiste, mais il semble bien que la guerre entre dans une nouvelle période. Alors que l’on voulait croire, surtout à Londres, que l’Ukraine pouvait gagner, il apparaît que, pour l’instant, pour les semaines qui viennent, elle ne puisse que limiter les dégâts, se battre pour ne pas perdre tout le Donbass afin qu’il ne puisse y avoir des référendums pro-russes. L’armée ukrainienne est fatiguée, en attente de ses nouveaux matériels et d’une formation ; les troupes russes sont aussi épuisées, elles auraient perdu, selon Kiev, plus de 30 000 hommes et compteraient près de 60 000 blessés. Des deux côtés, il y a des désertions et des refus d’obéir.
Le but des Occidentaux reste, sinon la défaite de la Russie, au moins son affaiblissement afin, comme le disait Lloyd Austin, le secrétaire américain à la Défense, qu’elle « ne puisse pas recommencer ailleurs ».
Volodymyr Zelensky souhaite que ses alliés puissent mettre fin à la guerre « avant la fin de l’année ». Possible ? Pas certain. L’armée ukrainienne, qui dispose de davantage des réserves que la russe – qui recrute- devrait, selon les experts militaires temporiser, résister, se former avant de penser pouvoir prendre l’avantage. L’armée de Poutine a également besoin de souffler.
Les conversations rapportées par CNN ne traduisent qu’un aspect de la réalité, celui du terrain aujourd’hui, pas forcément demain. Quant aux concessions, il n’en est pas question. Kiev n’envisage pas de négocier et Moscou réclame uniquement une capitulation.