Un Président de la république qui reçoit un député. Que le député en question est une députée qui a annoncé la veille avoir entamé une grève de la faim. Que la députée, en grève de la faim, appartient au groupe politique dont le chef Mohamed Abbou, mari de la députée, avait été lui-même reçu, une dizaine de jours auparavant, par Le Président… Avouez tout de même que c’est un peu trop. Un peu trop partisan et trop subjectif de la part de celui qui est censé être au dessus de la mêlée, pour être toléré.
Un Président qui joue la vierge effarouchée devant les caméras pour livrer à la députée le surprenant secret, de polichinelle, selon lequel il ignorait qu’un remaniement ministériel était en préparation, alors que tout le monde, de Bizerte à Borj El Khadra, le savait et connaissait, au nom près, les ministres concernés. Là c’est franchement prendre les Tunisiens pour des imbéciles. Par qui s’il vous plaît? Par le premier d’entre eux.
Un président qui ignore superbement le jour d’anniversaire de la Révolution, sans laquelle, Révolution, il n’aurait eu aucune chance d’être là où il est, ouvrant ainsi la porte à toutes sortes de questions aussi inquiétantes et brûlantes les unes que les autres. Là on dépasse toutes les limites. On entre dans la zone rouge.
On sait que Le Président Saïd est un grand sensible. Point n’est besoin de beaucoup d’arguments pour le prouver. Il suffit juste de le voir discourir, cherchant avec une souffrance évidente à convaincre avec un pathétique déplacé et une enflure verbale qui rappellent par trop les lecteurs de nouvelles de la célèbre Radio égyptienne des années soixante, Sawt Al Arab. Bien sûr que Le Président a le droit d’être sensible. Mais être sensible ne l’autorise pas à s’aligner sur un groupe ou un mouvement politique parce qu’il lui a déclaré son soutien ou qui lui a jeté des fleurs. Ni à finasser pour nous convaincre qu’il est un fin politicien. Il n’a pas besoin d’être secret pour être admiré, ni menaçant pour être craint.
Nous voulons que Kaïs Saïd soit ce pourquoi les Tunisiens l’ont élu. C’est-à-dire leur Président. Le symbole de leur unité. De leur solidarité. De leur ambition .De leur élévation. Nous voulons qu’il soit une présence inspirante et rassurante. Une parole claire et apaisante. Et surtout compréhensible. Nous voulons un Président rassembleur.
Hélas, c’est un Président tout autre que nous avons jusqu’aujourd’hui. Quand il prend la parole, c’est pour nous rendre plus anxieux. Et quand survient un problème qui menace la paix civile dans le pays ou l’unité de son peuple, comme cela a été le cas récemment avec l’incident de violence survenu au Parlement entraînant la grève qui a paralysé cette institution, il n’est pas là et se mure derrière un silence assourdissant. Il est là par contre quand il y a une occasion de jeter l’huile sur le feu, d’envenimer une querelle ou d’attiser un différend. L’essentiel étant pour lui de ne point se mouiller, de rester loin de tout cela, inapprochable, n’ayant en tête, on dirait, que la prochaine présidentielle…en 2024.
C’est loin 2024 Président!