Les relations avec la Chine et l’Afghanistan préoccupent le président Biden, mais son conseiller à la sécurité nationale, Jake Sullivan, affirme que « de notre point de vue, une première priorité essentielle doit être de faire face à ce qui est une crise nucléaire croissante alors qu’ils (l’Iran) se rapprochent de plus en plus d’avoir suffisamment de matières fissiles pour une arme ». De son côté, le secrétaire d’État Antony Blinken déclare que si l’Iran revenait en pleine conformité avec ses obligations en vertu du JCPOA, les États-Unis feraient la même chose ». A Téhéran, on réclame plutôt l’inverse et le ministre des Affaires étrangères Javad Zazif répond que la demande américaine « n’est pas adéquate et ne se produira pas ». Aux Américains qui sont sortis de l’accord de faire le premier geste. L’Iran vient d’ailleurs de marquer un point: hier, la Cour internationale de justice s’est déclarée compétente pour recevoir la demande de Téhéran d’annuler les sanctions rétablies par l’administration de l’ancien président américain, Donald Trump. Washington est déçu tout en considérant que cette décision « préliminaire » ne porte pas « sur le fond ».
Si Joe Biden est décidé à revenir dans l’accord de 2015, le Joint Comprehensive Plan of Action signé par les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’Onu plus l’Allemagne, l’Iran et l’Union européenne, il ne semble pas que la reprise des négociations directes entre Washington et Téhéran soit pour demain. Cependant, des contacts auraient lieu par divers canaux. Les intermédiaires seraient le Koweït, Oman, le Qatar et l’Irak, dont le ministre des Affaires étrangères était hier en Iran. Le Japon tenterait aussi une médiation, mais l’Union européenne est la partie la plus impliquée dans la résolution du différend. Elle travaille « très dur » pour remettre le JPCOA sur les rail. L’Iran aimerait d’ailleurs que l’Union européenne joue les médiateurs et l’on prête à Emmanuel Macron l’intention de jouer un rôle important… Le but est d’arriver à une synchronisation: levée des sanctions annoncées en même temps que l’arrêt de l’enrichissement de l’uranium.
Pour l’instant, Téhéran aurait plutôt tendance à durcir sa position. Le processus d’enrichissement de l’uranium à 20% a repris et de nouvelles centrifugeuses sont en cours d’installation. Le président Rohani refuse tout nouvel ajout de clause à l’accord, tout nouvel interlocuteur. Partisan de l’accord, il doit se montrer ferme dans l’optique de l’élection présidentielle du 18 juin prochain que son camp réformiste et modéré a, aujourd’hui, peu de chances de remporter. Le conseil des gardiens et le Majlis sont dominés par les ultra conservateurs qui ne cessent de s’opposer aux Etats-Unis, de faire monter la tension.
Quand elles reprendront, les négociations iront plus loin que l’accord de 2015, engloberont d’autres sujets dont les missiles et l’influence iranienne dans la région. Certains pensent qu’il pourrait être judicieux de laisser l’Iran acquérir l’arme nucléaire mais en le ramenant dans le « bon » camp, en le réintégrant dans la communauté internationale. Vaste programme… La situation économique catastrophique, même si Rohani en est en partie responsable, et le ras le bol de la population pourraient cependant faire bouger les lignes. 70 à 80% de la population vit sous le seuil de pauvreté, les prix ne cessent d’augmenter, ceux de la viande, des bus ou des logements ont doublé en un an. Pour le seul mois dernier -mi décembre à mi-janvier- l’inflation a été de 46%. Officiellement, chiffre du FMI, le chômage n’est que de 16%, mais il suffit de travailler une heure par semaine pour être classé comme ayant un emploi. Les suicides et les violences se multiplient comme les addictions à la drogue dues au trafic afin de gagner quelques rials, la monnaie qui ne cesse d’être dévaluée.
La population qui souffre a de plus n plus de mal à supporter le régime des mollahs, la corruption et les détournements. le fossé se creuse entre les riches et les pauvres, la classe moyenne disparaît, mais la police n’est pas tendre avec les manifestants. De plus en plus d’Iraniens s’exilent en Turquie, pays pas vraiment libre, à la recherche d’une vie meilleure.