Elle a la couleur de la vraie pistache, la consistance et l’aspect de sa poudre concassée et «même le goût à s’y méprendre», selon ses promotrices. On en garnit les baklavas et on en farcit les qatayefs et la kunafa, pâtisseries et desserts traditionnels du ramadan. Des dizaines d’Egyptiennes, mères de famille ou influenceuses, vantent sur les réseaux sociaux leur recette de «pistache menteuse».
La crise économique aiguë qui sévit en Egypte, avec une inflation faisant flamber tous les prix alimentaires, provoque souffrance et frustration dans la population, surtout pendant le mois de jeûne. La hausse vertigineuse des prix des fruits secs, y compris de la vraie «pistache d’Alep», comme on l’appelle à travers le monde arabe en référence à sa ville d’origine, a rendu le produit si prisé inaccessible à la majorité des ménages égyptiens. Ils ont surnommé les fruits secs «pierres précieuses», du fait de leur prix prohibitif.
Pour ne pas se priver d’un ingrédient essentiel, les Egyptiennes ont trouvé un substitut : «la fève soudanaise», comme on nomme localement les arachides. «Elle ne coûte que 10 livres égyptiennes [20 centimes d’euros, ndlr] le kilo», plaide l’animatrice de la page de cuisine Supermama sur YouTube, soit 50 fois moins que le même poids de pistaches authentiques.
Les différentes recettes pour préparer la fausse poudre de pistache, dite «menteuse» ou «trompeuse», se ressemblent à quelques petites variantes près. On prend une belle poignée d’arachides crues bien blanches que l’on concasse dans un hachoir, sans les écraser. Puis on mélange dans un bol les fruits secs cassés avec trois cuillerées d’eau en y ajoutant quelques gouttes de colorant vert et d’essence de pistache. On étale la mixture sur une feuille de papier cuisson dans un plat allant au four et on fait griller à 160°C pendant un petit quart d’heure. L’aspect de la poudre granuleuse ainsi obtenue ressemble parfaitement à celle dont on saupoudre les baklavas et autres pâtisseries orientales.
La formule de «la pistache économique», comme la présente l’instagrameuse Sally qui la «conseille à toute maîtresse de maison», a suscité toutefois quelques débats sur les réseaux sociaux égyptiens.