Le cinéaste Sean Baker a reçu à 53 ans la Palme d’or samedi du Festival de Cannes pour «Anora», un thriller new-yorkais qui passe des bas-fonds aux villas de luxe des oligarques russes, et laisse augurer d’un renouveau du cinéma indépendant américain. «Ce film est magnifique, empli d’humanité (…) Il nous a brisés le coeur», a déclaré la présidente du jury et réalisatrice de «Barbie» Greta Gerwig avant de lui remettre le prix. Sean Baker, dans son discours, a livré un plaidoyer pour les films en salles: «Il faut que le monde se rappelle que voir un film sur son téléphone portable ou la maison ce n’est pas la manière de voir des films.» «En salle on partage la tristesse, la peur, le rire», a-t-il insisté.
Une consécration pour un cinéaste indépendant
Ce n’est pas la première fois que l’Américain de 53 ans, à l’allure juvénile, est sélectionné à Cannes. Mais cette fois, le Festival a goûté la vitalité de son thriller qui passe des bas-fonds new-yorkais aux villas de luxe des oligarques russes. Ce conte à la Cendrillon version 2024 est servi par une révélation, l’actrice Mikey Madison, dans le rôle d’une travailleuse du sexe. Une consécration pour un cinéaste indépendant comme lui, qui a éclos tardivement et a longtemps mangé de la vache enragée avant de se faire un nom.
Initié au cinéma par sa mère enseignante, il a eu le déclic à l’âge de six ans en voyant Boris Karloff jouer Frankenstein. «A partir de ce moment, c’était le cliché total: films en super 8, en caméscope, ciné-club au lycée, torturer ma soeur pour la faire jouer dans mes films», a-t-il raconté à «The Guardian» en 2017.
Addiction à l’héroïne
Il finira logiquement par étudier le cinéma à la New York University et tournera un premier film, «Four Letter Words». Mais il tombe dans les excès en tous genres et devient accro à l’héroïne. «J’ai perdu beaucoup de temps. C’est pourquoi quand vous regardez mes homologues, ils ont dix ans de moins que moi. Je suis passé par de sales moments.»
Sorti d’affaire, Sean Baker s’accroche à sa passion, s’efforçant de «rester dans l’industrie du cinéma, même si c’est juste à la marge». «Je veux parler de monter des vidéos de mariage, des films d’entreprise, et même à un moment je faisais de la duplication» de cassettes vidéo et de DVD, confiait-il au site thecreativeindependent.com.