Quatre ingénieures tunisiennes ont conçu un fauteuil roulant innovant, baptisé « Moovobrain », qui peut être commandé par le cerveau, la voix ou des expressions faciales. Cette initiative vise à améliorer le quotidien des personnes à mobilité réduite et dépendantes. Le projet est arrivé en finale du concours des Jeunes inventeurs de l’Office européen des brevets (OEB), une première pour une équipe tunisienne.
Cette équipe figure parmi les trois lauréats — choisis entre plus de 550 candidats — du prix des Jeunes inventeurs de l’Office européen des brevets (OEB), un organisme intergouvernemental, qui sera décerné le 9 juillet à Malte.
Les inventrices se sont connues à l’Institut supérieur des sciences médicales à Tunis, où elles ont développé le prototype de leur application Moovobrain à partir de 2017, avant de créer deux ans plus tard la start-up Gewinner.
L’inspiration initiale de Moovobrain est venue de Souleima Ben Temime, 28 ans, business développeuse et cofondatrice, dont l’oncle s’est retrouvé paralysé, aussi de la partie supérieure du corps, après un grave accident, et « obligé d’utiliser une chaise roulante pour se déplacer » et être assisté en permanence.
« Il était devenu complètement dépendant. Les besoins étaient devant mes yeux, j’en ai parlé à mes amies et on a décidé d’utiliser les technologies de santé numérique que nous maîtrisons pour faire un produit pouvant bénéficier à énormément de gens », dit-elle à l’AFP.
Pour les personnes à mobilité réduite, toute action, même « demander à être tourné vers la télévision », quand elles « ne peuvent pas parler, ne plus avoir aucune autonomie, peut devenir très éprouvant sur le plan psychologique », abonde Khaoula Ben Ahmed, 28 ans, cofondatrice et gérante, pendant une démonstration du fauteuil à Tunis.
Agées de 28 et 27 ans, Sirine et Ghofrane Ayari (sans lien de parenté) complètent l’équipe.
« La valeur ajoutée » de cette invention, souligne Khaoula Ben Ahmed, c’est « d’avoir quatre solutions en une seule: le pilotage avec tablette, mais aussi sans bouger les mains en commandant avec la voix, et si on en est privé, grâce à des expressions faciales comme les grimaces, ou simplement par la pensée », avec les ondes cérébrales.
Le fait que l’équipe soit arrivée en finale du prix des Jeunes inventeurs « va nous apporter de la visibilité et de la crédibilité » car « ce n’est pas toujours facile de convaincre les investisseurs ou les fabricants de fauteuils que notre solution est vraiment innovante et utile pour les personnes à mobilité réduite », estime Mme Ben Ahmed.
Le prix des Jeunes inventeurs – qui récompense des « inventeurs exceptionnels de moins de 30 ans » – est doté d’un premier prix de 20.000 euros, un deuxième de 10.000 et un troisième de 5.000, a indiqué l’OEB dans un communiqué.
« C’est la première fois qu’une équipe tunisienne et arabe arrive en finale » de cette compétition internationale lancée en 2021, selon l’OEB, qui décernera le même jour son prestigieux Prix de l’inventeur européen.
La start-up Gewinner livrera très bientôt quatre premiers fauteuils équipés de sa technologie à une association de porteurs de handicap à Sousse (centre-est de la Tunisie) surtout « pour avoir un +feedback+ utilisateurs », précise-t-elle.
A l’international, Gewinner vise l’Europe et a déjà noué un partenariat avec un fabricant italien pour une commercialisation à court terme.
Selon les inventrices, même si chaque fauteuil intelligent, équipé de leur application, coûte environ 2.000 euros, cette technologie peut être rendue accessible au plus grand nombre, y compris dans des pays moins nantis.