On sait depuis plus de 25 siècles, depuis le philosophe Aristote que « la nature a horreur du vide ». C’est-à-dire que la nature exige que tout espace doit être rempli de quelque chose, peu importe cette chose.
La politique aussi a horreur du vide. Et le même principe de remplacement se met à l’œuvre dès qu’on lui cède l’espace. Autrement dit, si l’on refuse volontairement de faire de la politique, la politique se fera de toute façon et ce sera forcément une mauvaise politique.
Le Président de la république refuse depuis trois mois déjà de recevoir la prestation de serment des nouveaux ministres pourtant validés par l’Assemblée des représentants du peuple(ARP).Il ne rencontre pour consultation ni le Président de l’Assemblée, ni le Chef du gouvernement. Carthage n’est plus qu’un lieu de résidence du Président qui y fait de temps à autre un discours enflammé pour approfondir les clivages au sein d’un paysage politique déjà bien fragmenté et alimenter les commentaires incendiaires des réseaux sociaux.
C’est la politique du grand vide.
Conséquences:
-un gouvernement qui tourne au ralenti à un moment où il doit fonctionner à pleine puissance et utiliser toutes les ressources matérielles et surtout morales possibles.
-Une piètre image des politiques considérés comme des « tous pourris », et de la politique comme simple moyen de se servir et de s’enrichir aux dépens d’une population saignée à blanc.
-Le doute qui s’installe dans la capacité des élites du pays à assumer la responsabilité de la révolution et de construire un État démocratique.
Mais la conséquence la plus grave demeure l’envahissement de plus en plus marqué de la sphère publique par des pratiques aux effets destructeurs. La violence tant matérielle que morale, l’accusation mensongère, la dénonciation calomnieuse, la désinformation et tant d’autres maux sociaux encore qui contaminent la vie politique. Appuyés, par des médias d’une terrifiante médiocrité, les honnêtes gens, les hommes encore attachés aux règles morales, les gens probes et loyaux sont balayés de la scène aux profits des forts en gueule, des roublards, des sans- gêne, des maîtres du micmac.
Laisser le pays s’enfoncer dans une aussi grande crise morale serait un impardonnable crime historique. Cette politique du grand vide doit s’arrêter. Le Président de la république, symbole de l’unité du pays, et donc de son intégrité physique et morale est appelé à mettre fin à cette « bouderie » et assumer sa responsabilité en remettant l’ouvrage sur le métier pour essayer de réhabiliter la politique dans ses nobles fonctions: servir, éduquer, donner l’exemple.
Sinon cette politique du grand vide va tout engloutir dans peu de temps.
Mohcen Lasmar