Une étude d’envergure dirigée par des chercheurs de l’université de Rome pointe l’Afrique du Nord autour du dernier millénaire avant notre ère. Ils établissent l’origine de nos chats domestiques… en Tunisie. Cela change totalement la version qu’on avait.
On a longtemps pensé que les chats avaient été domestiqués au Proche-Orient par les premiers agriculteurs du néolithique autour de -10 000 ; -5 000 ans.
À cette époque, on commence à cultiver et à stocker des céréales, les rongeurs se multiplient… les chats sauvages y voient une opportunité… qui arrangent bien les humains. Un rapprochement par intérêt mutuel.
Mais cette histoire était basée sur peu de restes archéologiques, qui ne sont pas simples à identifier, et surtout qui ne permettent pas de définir le degré de domestication. Il manquait des analyses génétiques de chats anciens et modernes, qui permettent d’avoir les liens de parenté et une idée des régions d’origines.
C’est ce qu’ont entrepris les chercheurs de l’université de Rome…
En collaboration avec 42 autres institutions, ils ont étudié les génomes de chats anciens retrouvés dans une centaine de sites archéologiques d’Europe, d’Anatolie et d’Afrique du Nord.
Ils se sont rendu compte que l’hybridation entre les chats sauvages africains et européens nous avait induit en erreur. Leurs résultats montrent qu’il y a eu deux vagues de dispersion vers l’Europe au cours du dernier millénaire avant notre ère. La première relie un spécimen retrouvé au Maroc aux félins sauvages actuels de Corse et de Sardaigne. Et la deuxième, un peu plus tard, fait le lien entre un ancêtre retrouvé en Tunisie et les chats européens actuels. Car c’est bien cet ancêtre qui est génétiquement plus proche des chats domestiques que nous connaissons.
À partir de là, ils ont pu suivre la trace de cette espèce partout en Europe. En Autriche, en Italie, en Serbie, jusqu’en Grande Bretagne. Une expansion qui coïncide avec le déclin des chats sauvages.
Sait-on comment et pourquoi ils ont été, à l’origine, domestiqués en Afrique du Nord ?
Les chercheurs évoquent trois hypothèses – qui ne s’excluent pas les unes des autres : comme la région de Carthage était fertile et agricole, le même rapprochement que celui imaginé plus tôt a pu arriver dans les fermes.
Autre possibilité, les Phéniciens ou les Carthaginois ont pu embarquer des chats avec eux pour s’occuper des nuisibles sur les navires. Mais ils penchent plutôt pour une dernière explication : ce serait plus pour des raisons culturelles que le chat a pris peu à peu place à nos côtés.
Une autre étude récente arrive à peu près aux mêmes conclusions.
L’Egypte est évoquée comme le berceau de notre relation avec les félins. L’image de Bastet, un déesse féline égyptienne, a pu influencer les civilisations voisines, comme celles qui vivaient en Tunisie. Les Grecs et les Romains ont parfois reconnu en elle leurs déesses de la chasse, Artémis et Diane. Certains spécialistes pensent que les chats se sont répandus en Europe par les routes de l’Empire romain. Et ce statut divin se prolonge jusque dans les croyances nordiques avec Freyja, déesse de l’amour dont le char est tiré par des chats. Cette nouvelle histoire, portée par les mythologies humaines, raconte des créatures dont la compagnie est plus symbolique qu’utile.