Les séparatistes soutenus par l’armée russe ont affirmé ce samedi avoir « totalement » encerclé Lyssytchansk, dans l’est de l’Ukraine, un ville clé au cœur d’intenses combats ces derniers jours. « Aujourd’hui, la milice populaire de Lougansk (l’armée séparatiste) et les forces armées russes ont occupé les dernières hauteurs stratégiques, ce qui nous permet d’affirmer que la localité de Lyssytchansk est totalement encerclée », a indiqué un représentant de l’armée séparatiste de Lougansk, Andreï Marotchko, cité par l’agence de presse russe TASS.
La prise de Lyssytchansk permettrait à l’armée russe d’avancer ensuite vers Sloviansk et Kramatorsk, deux autres grandes villes de la région industrielle du Donbass, que Moscou cherche à conquérir.
Kiev a démenti. « Les combats font rage autour de Lyssytchansk. Heureusement, la ville n’est pas encerclée et elle est sous contrôle de l’armée ukrainienne », a déclaré à la télévision ukrainienne Rouslan Mouzytchouk, un porte-parole de la garde nationale de l’Ukraine.
Dans le nord-est de l’Ukraine, à Kharkiv, la deuxième ville du pays, « la matinée […] a été particulièrement agitée », a rapporté le gouverneur régional, Oleh Synehoubov, selon qui des missiles ont frappé un quartier de la ville sans faire de victimes.
Igor Konachenkov, le porte-parole du ministère de la défense russe, a déclaré que l’armée de l’air russe avait frappé à Kharkiv l’usine de tracteurs locale où se trouvaient des troupes et des équipements de la 10e brigade d’assaut de montagne ukrainienne.
Sur le front sud, selon M. Konachenkov, l’armée russe a atteint 39 centres de commandement et deux dépôts de munitions près de Mykolaïv avec des tirs d’artillerie ou des frappes aériennes. Le gouverneur régional ukrainien, Vitali Kim, a fait état, pour sa part, d’explosions entendues dans la matinée et dont les autorités s’efforçaient de mesurer les conséquences.
D’une manière générale, a affirmé le porte-parole du ministère de la défense russe, « l’ennemi subit de lourdes pertes sur tous les fronts ».
L’armée ukrainienne clame haut et fort qu’elle a commencé à recevoir des canons de 155 mm (M777, Caesar et Panzerhaubitze 2000) et des lance-roquettes multiples de ses alliés occidentaux. Elle semble cibler les dépôts de munitions adverses dans le Donbass, pour tenter de réduire l’intensité des tirs de l’artillerie russe, qui est très forte. Des images des satellites du réseau Sentinel montrent une série d’incendies autour de dépôts de munitions, loin derrière la ligne de front, dans des zones contrôlées par les Russes.
Bombes au phosphore sur l’île aux serpents
L’armée ukrainienne a accusé vendredi soir les Russes d’avoir tiré des bombes au phosphore sur l’île aux Serpents dans la mer Noire, d’où les forces de Moscou se sont retirées jeudi après avoir été chassées par les Ukrainiens.
« Vers 18H00, les forces armées russes ont effectué à deux reprises une attaque aérienne avec des bombes au phosphore sur l’île aux Serpents », a écrit sur Telegram le commandant en chef ukrainien, Valeriï Zaloujniï, accusant Moscou « de ne pas respecter ses propres déclarations ».
Il a accompagné son message d’une vidéo sur laquelle on aperçoit un avion voler au-dessus de l’île aux Serpents et larguer aux moins deux bombes qui touchent leur cible, laissant apparaître de légères traînées blanches dans le ciel, un signe distinctif des bombes aux phosphore.
Les armes au phosphore sont des armes incendiaires dont l’usage est interdit contre des civils, mais pas contre des cibles militaires, en vertu d’une Convention signée en 1980 à Genève.
Kiev a accusé Moscou de son usage à plusieurs reprises depuis fin février, dont sur la population civile, ce que l’armée russe rejette catégoriquement.
1 500 km² du territoire ukrainien occupé
Le compte Ukraine War Map, qui cartographie les mouvements militaires et l’avancée des Russes en Ukraine depuis le début du conflit, a calculé vendredi qu’à la fin du mois de juin, Moscou contrôlait environ 1 500 km² de territoire ukrainien, soit 19,2 % du pays. L’avancée la plus significative du mois écoulé a été la prise de Severodonetsk et l’avancée des Russes au sud de Lyssytchansk, qui concentre désormais les frappes.
Cela représente une avancée considérable si l’on considère la période antérieure au 24 février, lorsque la Russe contrôlait à peine 8 % du territoire de sa voisine. A une échelle de temps plus courte, les gains territoriaux montrent cependant les difficultés russes à s’emparer des zones convoitées dans l’est de l’Ukraine. Les principales avancées ont eu lieu dans les premiers jours de l’invasion : une semaine après le début de la guerre, les forces de Moscou occupaient 22 % du pays, avant de se retirer des régions du nord quelques semaines plus tard. En juin, en un mois de bombardements acharnés dans l’Est, les Russes ont conquis 0,3 % de territoires supplémentaires, par rapport à la fin du mois de mai.
Détournement d’énergie ?
L’Institute for the Study of War (ISW, Institut pour l’étude de la guerre) estime probable, dans son analyse de samedi, que les autorités russes essayent d’intégrer la centrale nucléaire de Zaporijia au système énergétique russe. Le groupe de réflexion américain rapporte les propos d’Olga Kosharna, experte indépendante en matière d’énergie nucléaire, qui a affirmé jeudi que les employés de Rosatom, l’entreprise publique russe spécialisée dans l’énergie nucléaire, menaient des actions au sein de la centrale afin de détourner l’énergie produite vers le réseau électrique russe.
L’experte a ajouté que les forces russes œuvraient à Tchonhar, dans le sud de l’oblast de Kherson, pour rétablir la principale ligne électrique reliant l’Ukraine à la Crimée et détruite par les Ukrainiens en 2015 après l’annexion de la péninsule par la Russie.