Nommé à la tête du Service Culture au quotidien national « Le Soleil » à Dakar, Massiga Faye est chargé de couvrir l’actualité culturelle au Sénégal, en Afrique et en Europe : coordonnateur du Dak’Art Actu, il participe au festival d’Ouagadougou (Burkina Faso) à un atelier pour journalistes culturels d’Afrique de l’Ouest. Il prend part également au Bushfire festival (Swaziland, Sud de l’Afrique), Marché des arts du spectacle africain (Masa, en Côte d’Ivoire), Salon du design de Frankfurt (Allemagne). Il est surtout l’un des plus grands fidèles du Festival international du film francophone, (FIFF) Namur en Belgique depuis 2014. Membre de l’Association de la presse culturelle du Sénégal (Apcs), Massiga Faye est aussi membre de l’Association sénégalaise des critiques cinématographiques affiliée à la Fédération africaine des critiques de cinéma. Entretien.
*Vous êtes fidèle du FIFF depuis une dizaine d’années, penseriez-vous que la participation des pays arabes et africains francophones est en train de régresser au fil des ans sauf pour de rares pays. Pourquoi selon vous ?
– Je suis tenté de répondre par l’affirmative. Cette tendance est beaucoup plus remarquée dans les pays africains francophones notamment dans la partie subsaharienne. Une des raisons qui pourraient l’expliquer : le manque de financement. Cette question met en lumière la pertinence de miser sur la coproduction entre les différents pays. En mutualisant les moyens, cette approche donne plus de possibilités aux projets de films d’être concrétisés.
*Votre pays, le Sénégal, a présenté lors de la 39ème édition, un court métrage « Lees Waxul » de Yoro Mbaye… Comment le public namurois l’a-t-il reçu ?
-Lors de cette 39ème édition, le Sénégal était présent dans la catégorie Court- métrage avec « Lees Waxul » de Yoro Mbaye. Cette fiction de 21 mn met en lumière nos interactions sociales dans un environnement socioculturel qui n’est pas forcément celui du public namurois. C’est cela qui fait l’intérêt du FIFF, une plateforme qui célèbre la diversité dans une expression plurielle.
*La Tunisie comme vous le savez, vient d’être récompensée triplement ; « Les enfants rouges », Bayard d’or du meilleur film et Bayard de la meilleure photographie. Quant à « Là d’où l’on vient », il a reçu le Bayard de la meilleure première œuvre… On aimerait avoir votre avis et savoir quelle œuvre vous a intéressé le plus ?
-Personnellement, c’est le film « Là d’où l’ont vient » de Meryam Joobeur qui m’a interpellé le plus. Il met en scène Aïcha, une mère tunisienne douée de rêves prophétiques. En dépit des péripéties de la vie, elle reste attachée à sa famille, particulièrement ses fils Mehdi et Amine. L’amour à toute épreuve d’une maman pour sa progéniture. Avec trois distinctions dans un même festival, on peut avancer que le cinéma tunisien amorce un renouveau.
*Quels étaient vos coups de cœur surtout les films français et belges qui accaparent la part de lion de la programmation en général ?
-Je suis tombé sous le charme du film d’ouverture « En Fanfare ! » du réalisateur français, Emmanuel Courcol. Ce 3ème long métrage est à la fois humain et mélodieux notamment avec les compositions de Maurice Ravel (Boléro) et la chanson « Emmenez-moi » de Charles Aznavour. Avec un scénario précis qui respire l’authenticité, Emmanuel Courcol habille subtilement la lumière, les couleurs au service de l’émotion. Le film est à la fois fort et sensible.
Un autre coup de cœur : « Saint Ex » du réalisateur franco-belge Pablo Agüero avec une interprétation de Louis Garrel, Vincent Cassel, Diane Kruger. Cette œuvre rendant hommage à un pionnier de l’aviation chante la persévérance, l’espérance. Avec une mise en scène subtile et efficace, Agüero célèbre le don de soi à toute épreuve.
*Les Journées Cinématographiques de Carthage qui pointent du nez chez nous, vous disent-elles quelque chose en tant qu’homme de culture et de médias sénégalais ?
-L’évocation des Journées Cinématographiques de Carthage a une résonance particulière pour un Sénégalais. Les JCC ont toujours servi de pont entre la Tunisie et l’Afrique subsaharienne. Les cinéastes sénégalais se sentent comme chez eux à Tunis. La preuve, en 2022 le Septième- Art sénégalais était à l’honneur lors de la 33ème édition les Journées cinématographiques de Carthage. Les JCC avaient accueilli plusieurs films sénégalais dans le cadre de la compétition officielle. Parmi ces œuvres : le long métrage « Xalé : Les Blessures de l’enfance » de Moussa Sène Absa ainsi que « Rewind& Play » d’Alain Gomis. Il y avait également l’affiche de cette édition inspirée du portrait de la grande actrice Mbissine Thérèse Diop, héroïne du film « La Noire de… », réalisé par Ousmane Sembène, « Tanit d’or » aux premières JCC en 1966. C’est dire combien la culture et le cinéma peuvent rapprocher des peuples.