Par Sayda BEN ZINEB
Lors d’une conférence de presse tenue mardi 30 janvier par Anis Gharbi, Country manager de Mubawab, la plateforme digitale dédiée à l’immobilier, Mubawab, a présenté un bilan du secteur à partir de son portefeuille d’annonces recueillies tout le long de l’année 2023. Ce bilan consiste en six études approfondies par zone géographique qui va en granularité jusqu’au niveau du quartier. La superficie et la typologie du bien est aussi prise en compte. Voici une lecture dans ces chiffres qui confirment que l’immobilier reste une valeur refuge, mais de plus en plus pour les nantis.
Achat / Vente
La capacité de s’approprier un bien certes s’érode chez la population tunisienne avec un taux d’évolution du prix moyen national au m2 des appartements en 2023 par rapport à l’année 2022 qui atteint 9%. Néanmoins, il y a encore de l’intérêt pour l’achat par rapport à la location car 53% des demandes enregistrées sur le site concernent l’achat. Un peu plus que la moitié de ces demandes concernent des appartements et seulement 15% des villas. Conformément à ce contexte, la typologie des biens préférés se concentre autour des S+2 avec une moyenne de la superficie comprise entre 100 et 130 m2 pour un tiers de l’offre et de la demande. Vient ensuite la catégorie des biens un peu plus grands de type S+3 avec des surfaces allant jusqu’à 170 m2 pour un quart, à peu près, de la demande et de l’offre. Les S+1 constituent 20%, à peu près, de l’offre et la demande.
Sans surprise, les quartiers qui tiennent la tête de liste des zones les plus onéreuses à l’achat des appartements se situent dans le Grand Tunis. On trouve d’abord Les Jardins de Carthage (4100 DT au mètre carré dans l’ancien, 4850 DT dans le neuf), puis Ain Zaghouan Nord (3250 DT et 3700 DT respectivement), Cité Ennasr 2 (2740 DT et 3300 DT) et La Soukra (2810 DT et 3200 DT). Par rapport aux régions du pays, c’est Hammamet (Nord et Sud) au Cap Bon qui l’emporte avec une moyenne de prix de près de 2900 DT au mètre carré dans l’ancien et 3200 DT dans le neuf.
Le tensiomètre locatif
La demande de location porte majoritairement sur les appartements, pour 72% de la totalité des demandes, contre 54% de l’offre de location sur ce type de biens. Cela confirme la tension du marché locatif, dans l’impossibilité de s’acheter son propre appartement. Le taux d’évolution du prix moyen de location des appartements en 2023 par rapport à 2022 est de 11%. On constate ici la même préférence des types de biens mis à la location que celles dédiées à la vente (S+2, moyennes surfaces). Le podium des zones du Grand Tunis en termes de cherté locative est occupé par les Berges du Lac 2 (2000DT par mois pour un S+1, 2600 DT pour un S+2 et 2950 DT pour un S+3), La Marsa (1800 DT, 2270 DT et 2670 DT respectivement) et Les Jardins de Carthage (1550 DT, 2000 DT et 2560 DT). Les loyers les plus abordables se trouvent au Mourouj 6, Riad El Andalous et l’Aouina. Pour ce qui est des régions, Hammamet (Nord et Sud) tient la dragée haute, avec des loyers entre 1040 DT et 1720 DT selon la surface, suivie de Hammam Sousse au Sahel (plus de 800 DT).
Immobilier d’entreprise
L’étude ne précise pas le profil des investisseurs qui publient leur offre estimée à 8% des annonces de vente et 7% des annonces de location de bureaux et locaux commerciaux. Ce volume, relativement faible, indique que le prix de location de tels biens a augmenté de 15%. Les zones les plus chères sont les Berges du Lac 2 (300 DT au mètre carré à la location, 4980 DT à la vente), Le Centre Urbain Nord (280 DT et 4300 DT respectivement) et Les Berges du Lac 1 (270 DT et 4320 DT). Ceci traduit encore une fois, la concentration de l’activité économique dans ces zones.
Le guide foncier
Le pourcentage des offres de terrains par rapport au total des offres sur les biens proposés à l’achat (26%) est quasiment le double de celui des demandes sur les terrains par rapport au total des demandes (13%). Le site n’est pas précis sur le nombre de telles annonces (même si on sait que le total des annonces actives est de 44 000 annonces) mais si on suppose qu’il y a, en général, au moins autant d’offres que de demandes sur le site, on peut prétendre que les terrains nus sont beaucoup plus proposés à la vente qu’à l’achat. Les acteurs du marché sont rebutés par l’achat de terrains aux prix déjà élevés ainsi que par l’entreprise même de se construire son propre foyer ou de se lancer dans la promotion immobilière. Il y a certes là l’empreinte de deux phénomènes : le coût grandissant de la construction ainsi que les obstacles administratifs qui l’accompagnent. Le prix le plus élevé du foncier se situe au niveau du Grand Tunis et, plus précisément, les Jardins de Carthage avec 2800 DT au mètre carré. Au niveau régional, les terrains nus à Hammamet Nord coûtent 1100 DT au mètre carré.
La location estivale
Le marché digital de location pour des courtes durées est encore naissant en Tunisie avec seulement 5% des demandes enregistrées sur la plateforme. Le caractère saisonnier des locations estivales explique aussi ce pourcentage assez faible. Les destinations balnéaires les plus prisées restent Hammamet, Kélibia, El Kantaoui et Chott Mariem (entre 100 DT et 390 DT la nuitée pour les petits appartements et entre 350 DT et 1500 DT les villas).
L’Indice des Prix de Mubawab (IPM)
Cet indice est calculé par Mubawab et suit l’évolution des prix du secteur. On remarque qu’il a été relativement stable avec une reculade durant la période de la Covid, mais en hausse depuis le troisième trimestre 2022.
Les demandes étrangères par pays de résidence
La France est largement en tête des acheteurs non résidents sur le territoire national avec un peu moins que 50% sur les biens et le foncier, suivie de loin par l’Allemagne avec moins de 10%. Les pays du Golfe, Qatar, Arabie Saoudite et Emirats Arabes Unis, totalisent près de 15% de la demande.
L’étude présentée par la plateforme digitale dédiée à l’immobilier Mubawab attire enfin l’attention sur les défis et les axes de développement du secteur. On note qu’il y a urgence à rendre la data immobilière plus accessible et plus transparente. A notre avis, la numérisation des transactions et leur publication, en protégeant les données personnelles bien évidemment, devrait aider dans ce sens. La plateforme pointe aussi vers le report de l’augmentation de la TVA qui devrait donner un bol d’air au secteur cette année. D’autre part, elle recommande la facilitation des démarches administratives pour les Tunisiens résidant à l’étranger et la mobilisation de l’Etat face aux défis énergétiques et climatiques.