Par Sayda BEN ZINEB
Invitée par Rotary Club La Marsa et son président Sami Chaherli, l’historienne Leila Blili Temime, vient de présenter son livre « Les femmes de la Maison Houssaynite, Al Harim Al Maçoun», (Edition Script, collection Histoire, 2021), lauréat du prix Louis Marin (2023) décerné par l’Académie des Sciences d’Outre-mer.
L’auteure a essayé de démontrer tout au long de sa conférence, l’importance du pouvoir des femmes pour rétablir la légitimité dynastique durant la période ottomane en Tunisie, et pour aller plus loin, elle a évoqué le rôle joué par les femmes en utilisant le Palais dans la lutte anticoloniale. « La Maison Houssaynite » passe en revue selon Leila Blili Temime, le pouvoir politique, symbolique et économique de ladite période.
« En 300 pages, l’auteure introduit ses lecteurs dans les coulisses d’un univers exceptionnel, sans pour autant verser dans le croustillant ou le sensationnel. Aucun écart par rapport aux faits établis: une analyse approfondie des liens de mariage, une galerie de portraits, et la description d’un mode de vie. Non sans l’évocation de la hiérarchie, des règles en usage, des influences, des intrigues et des destins… »
Une vie, un combat
Professeure émérite à l’université de la Manouba, spécialiste d’histoire sociale et d’histoire de la famille, Leila Blili Temime est une grande militante des libertés et des droits de l’Homme dans les années soixante dix. Elle participe activement entre 1969 et 1974 au mouvement étudiant en tant que membre de corporation d’histoire ; elle s’engage également au mouvement de février 1972 avant de rejoindre le mouvement clandestin « Perspectives » tenu par de jeunes étudiants tunisiens qu’on appelait « les perspectivistes » qui avaient choisi l’extrême gauche pour s’opposer au pouvoir absolu de Bourguiba.
En novembre 1973, la jeune militante est arrêtée par la police politique et passe avec des dizaines de camarades plus de deux mois dans les locaux de la Sûreté de l’Etat. Libérée en janvier 1974, elle est élue avec Laaroussi al Gharbi comme première représentante des étudiants au conseil scientifique de la faculté. Cette élection malgré sa légalité lui vaut une nouvelle arrestation en février 1974 et un transfert à la prison des femmes de la Manouba jusqu’à la fin de juin 1974. Après comparution devant la Cour de Sûreté de l’Etat, elle fut condamnée cette fois à un an de prison avec sursis
Empêchée de s’inscrire pour la préparation d’un DEA, elle réussit grâce à l’un de ses professeurs français, à s’inscrire à la Sorbonne pour la préparation d’un mémoire sur « La fédération communiste de Tunisie : 1920-1922 : un effort précoce de tunisification ». Ce mémoire sera soutenu après l’obtention d’un passeport en 1976. Elle soutient par ailleurs en 1986, sa thèse de 3ème cycle autour du thème :« Structure et vie de famille à Tunis à l’époque précoloniale et coloniale 1874-1930 ».
En 2006, elle obtient son doctorat d’Etat en soutenant une thèse intitulée : « Parenté et pouvoir dans la Tunisie Houssaynite », ce qui lui a valu honneurs et distinctions dans les instances internationales à Alger, Rabat, Istanbul, Paris, Sicile, Prague, etc… Rappelons que Leila Blili Temime qui n’a jamais failli à son engagement au sein de la société civile et auprès des sphères culturelles, est aussi auteure de « Sous le toit de l’Empire, la régence de Tunis : 1535-1666 » (Genèse d’une province ottomane au Maghreb) (Tome 1-2012), et « Sous le toit de l’Empire : Deys et Beys de Tunis, du pouvoir militaire à l’anarchie » 1666-1902 (Tome 2- 2018).