Avec la disparition, hier, de la chanteuse Zouhaira Salem, une page d’une certaine histoire de la chanson tunisienne se tourne définitivement. Parlons d’abord de l’artiste, descendue de sa Béja natale au débuts des années soixante ,avec sa silhouette frêle et ses yeux brillant d’ambition. Très vite, dans une capitale en plein chantier de reconstruction culturelle, la jeune chanteuse intégra le milieu fermé des chanteurs alors appelés à apporter le soutien moral au projet modernisateur d’un pays qui prenait sa destinée en main. Comme ses illustres collègues, Nàama, Oulaya, Safiya Echamia et Soulef, elle sera, dés le début de l’émission des programmes télévisés en 1965, un visage habituel des soirées musicales qui faisaient le bonheur des téléspectateurs, inévitable, presque. Il faut dire que son mariage avec Abdelhamid Belalgia, alors chef d’orchestre de la troupe de la radio-télévision était sans doute pour beaucoup dans la montée fulgurante de la chanteuse. Mais il faut dire aussi qu’elle avait un grand charme, une belle présence, et ,surtout, une voix unique, reconnaissable entre mille grâce à un petit enrouement caractéristique. Son caractère de feu complétait le portrait et la rendait si proche de ses collègues, comme de son public. Zouhaira Salem, de vrai nom Zahira Brahmine, interpréta toutes sortes de chansons: des romantiques, des patriotiques, des religieuses. Elle chanta l’oriental égyptien, le populaire libyen et koweïtien…et toujours avec le même goût pour la mélodie conjuguée au rythme. Son attachement à un style de chanson répondant aux exigences d’un texte intelligemment écrit, d’une composition musicale et rythmique maîtrisée, et d’une tenue sur scène respectueuse, semblaient, déjà de son vivant, relever d’une époque disparue bien avant qu’elle nous quitte. C’est une page du bon vieux temps qui se tourne.
Khadija.M